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16/05/2007

NATION ET TERRITOIRE SONT DANS UN BATEAU

Il faut, aussi vite que possible, accepter cette idée triste et nécessaire que Nation et Territoire n’ont plus rien en commun. Nous avons été expropriés des terres sur lesquelles nous résidons encore et où nos ancêtres fertilisent le Special K ou le fourrage à MacHeidi.

 

 

Nos culs sont pour moitié propriété de l’Etat, pour l’autre moitié des grossistes planétaires auxquels ils nous vendent pour le bien de la Croissance. Quant à nos rues, elles n’appartiennent pas à ceux qui y descendent mais à ceux qui les squattent en permanence parce qu’ils n’ont rien d’autre à foutre ou parce qu’ils sont payés pour y maintenir un semblant d’ordre. Monsieur Moyen ne fait qu’en raser les murs. Il n’aime pas forcément ce qu’il y croise mais quoi ? Pas le temps d’y penser.

 

 

La Visa demande à être renflouée. Le chef de rayon chronomètre le retard accumulé. Les lardons réclament leur triple dose de sucre. Les choses sont encore suffisamment normales pour que les questions sérieuses soient déléguées à la police, aux partis, aux syndicalistes, aux collectifs Citoyens, à n’importe quel blaireau à porte-voix ou carte officielle du moment que ça ne nous occupe pas du temps de productivité, de zapping ou de Merdic Walking.

 

 

Si quelque chose nous concerne tous, alors « ça » ne concerne jamais que les autres, eux seuls. Ma banquette du Titanic est confortable, l’orchestre n’en est qu’à son premier rappel, la femelle pas farouche est abondante, les stocks de champagne sont inépuisables, et y a même pas besoin de les payer puisque la maison fait crédit. Enjoy, comme disait Coca il y a encore peu. Enjoy jusqu’à plus soif, enjoy jusqu’à la gerbe, enjoy jusqu’à la décomposition.

 

 

Ceci dit, rien n’indique que nous autres Blanchouilles soyons dans une merde plus odorante que nos nouveaux invités surprise. En fait, tant les fafs que les mondialistes de tous poils se plantent à ce niveau : ni les nouveaux colons ni les anciens maîtres n’ont plus de droits que les autres. En clair, le Système n’est pas raciste, que ce soit « anti-blanc » ou anti-portenawak. Il se contente de gérer les marchandises humaines dans l’entrepôt continental, sans états d’âme particuliers. Son idéologie ne va pas contre notre vision du monde, comme on aime tant à se le répéter ; elle ne se colle pas à elle non plus, comme le bavassent les clowns de rue qui animent la périphérie du G8. Elle s'en fout, simplement, elle se fout de tout ce qui ne peut pas être inscrit sur un constat d'infraction ou un bulletin de remboursement. Le Système croit au Vide, il le prône, il le pratique, il l’impose à chaque individu et chaque groupe.

 

 

Savoir tout cela et se le répéter tous les matins, bien sûr, ça ne change rien à l’histoire. « La douleur est une information », peut-être, mais quand on est « informé » par un kick dans les burnes, on ne prend pas du recul. On se plie en trois et on attend que ça passe. Même la coke n’y change rien.

 

 

Notre coke à nous autres, c’est l’acharnement activiste, le marathon du tract, la litanie furibarde des convictions jetées à la face de notre entourage, les conspirations d’arrière-salle, les petites attaques sordides entre sous-traitants de la dissidence locale, mêmes les calculs candides sur les chances de tel ou tel parti au pouvoir d’inverser la trajectoire de la Grisaille qui nous empoisse tous. Assez de rêves, de poses, de slogans et d’adrénaline pour faire tourner les têtes les mieux accrochées aux épaules – de quoi les faire enfler surtout, au point que beaucoup devraient se tartiner des rillettes sur les tempes pour passer les portes sans écorchures.

 

 

Mais cette orgie de ferveur et d’agitation ne sert qu’à entretenir les illusions du milieu sur son impact social, sur sa dangerosité pour l’Ennemi,  sur son statut d’élite politique. Impact zéro. Dangerosité nulle. Elitisme de secte dérisoire. Passent les mois, les années, les décennies, et la marée noire ne fait que monter tranquillement, sûrement, obstinément, en se contrefoutant de nos digues dérisoires, en noyant nos hurlements dans ses gargouillis ignobles, en pourrissant ceux de nos camarades qu’on croyait les plus droits, les plus exemplaires.

 

Soixante ans de résistances sporadiques n’ont RIEN changé, même pas retardé quoique ce soit. Nous sommes toujours dans la même fosse et le niveau du purin continue à monter. Faire partie des supposés Veilleurs ne nous sauvera pas de la même noyade que les plus comateux de nos contemporains. La connaissance n’est pas une arme : elle nous sert uniquement à savoir pourquoi nous n’aimons pas ce qui nous arrive, pas comment l’éviter. Sauf à se mobiliser pour son propre cul, fin de toute action collective. Belles crampes d’estomac en perspectives pour tous ceux qui voulaient apporter une contribution décisive, si minime soit-elle.

 

 

Le navire Occident coule et les Rats Noirs qui ne veulent pas sombrer avec devront quitter son bord. Mais pour aller où et y faire quoi ?  

 

 

L’exil n’est pas une option acceptable, sauf à avoir fait sienne la conception déracinée de l’ennemi. On n’est pas fidèle qu’à une lignée et une culture, on l’est aussi à un coin de Terre, si exigu soit-il, si abstraites que soient ses frontières. Un même peuple est divisé en dizaines, en centaines d’entités qui partagent un même ensemble de prédécesseurs mais qui parfois se tolèrent à peine pour des différences minimes de convictions, d’habitudes alimentaires, de rapport au terroir, d’accents même !

 

 

Le cas de la minuscule Suisse, point de détail dans l’histoire étatique de l’Europe, est emblématique : comme on s’aime, comme on se tolère, comme on est hypersolidaires entre Genevois, Valaisans et Vaudois ! Vraiment, quelle délicate harmonie règne entre Welsches et Suisses-Totos ! Pareil que pour nos grands voisins, qui se sont mutuellement étripés au moins depuis la conquête romaine, malgré des appartenances ethniques et culturelles indubitablement communes. Nous nous sommes foutus sur la gueule les uns les autres pendant deux bons millénaires, pour ce que l’on sait avec certitude ; et on voudrait que ces habitudes disparaissent sous la simple pression migratoire allogène ? Grotesque.

 

On se retrouverait miraculeusement « entre nous » et nous seuls, que la baston fratricide n’attendrait pas une génération avant de reprendre comme un mouvement perpétuel à l’échelle mondiale. L’Eternel Retour de Nietzsche, c’est celui de ton poing dans ma gueule et réciproquement.

 

 

Reste que tout ça ne rend pas plus supportable de devoir s’acclimater ailleurs. La Nation a décidé de claquer ? Soit – mais la terre n’a rien demandé à personne, et elle se contrefout de savoir qui l’occupe.

 

 

A la limite, qui nous dit qu’elle ne voterait pas pour les « locataires » moins enclins à la bétonner, la goudronner, la parcelliser, la rentabiliser, la salir, la défigurer, comme nous l’avons si bien fait depuis un bon siècle de prétendu « développement » ? Le Visage Pâle a couvert ses champs de cheminées abjectes, de clapiers odieux, de décharges interminables, d’autoroutes perpétuellement bouchonnées, de putanats publicitaires criards et clignotants, de parcs à bétail touristique. Dans le même temps qu’il transformait son habitat en dépotoir, il a cessé de faire des gosses et a éduqué ses rares descendants à idolâtrer le lointain et vomir le prochain. Plus il est devenu vieux, plus il a joué à se croire jeune, à se goupiller des crèmes anti-age, à concilier autodestruction rock’n’roll avec rentabilité longue durée.

 

 

Il est permis de voir dans son actuelle disparition un colossal retour de manivelle naturel. Il a perdu son droit de vivre chez lui selon ses coutumes, puisqu’il a décidé qu’il n’était de nulle part et que les traditions des autres avaient plus de valeur. 

 

Ca fait mal au sac, oh que oui, mais c'est sans doute parfaitement mérité.