13/09/2009
NE NOUS DELIVRE PAS DU MAL
Quelque part, un jour. Passer devant une église en bécane. Se piquer au jeu du surnaturel et faire demi-tour. Se parquer, enlever son casque, prendre un air de circonstance, s'asseoir sur un banc, là où c'est un peu plus sombre qu'ailleurs, et tenir à peu près ce langage à Marie (qui est quand même plus sympa que son fils et son mec) :
Bien chère déesse,
J'ai compris que, d'habitude, vos fidèles s'adressent à Vous pour quémander une protection contre une merde imminente ou une guérison rapide une fois la merde attrapée. Si je me permets de Vous déranger, c'est pour une demande plus simple. Dans Votre grande miséricorde, car l'on dit que c'est votre spécialité, je vous demande un miracle : faites en sorte que la grippe mexiporcine soit à la hauteur de la catastrophe qu'on nous promet. Dépassez les craintes les plus démentes des vendeurs de masques et de vaccins : balancez-nous dans la gueule une vraie putain de pandémie qui ridiculisera les millions de morts de 1918. C'était plus ou moins le même virus, non ? Ca ne devrait pas être bien compliqué pour Vous.
Je veux bien m'aider, mais je sais que sans l'aide du Ciel, je n'irai pas bien loin. Je me lave aussi rarement les mains qu'auparavant, j'éternue soigneusement en-dehors de mon coude, je peux même tenter de répandre de la poussière de mucus au boulot et dans les supermarchés, mais quoi ? Ma foi fragile ne fera guère trembler les montagnes d'hygiénisme ambiant. Un divin coup de pouce serait le bienvenu.
L'homme, vous le savez, n'apprend ni n'entreprend rien par lui-même. Il n'avance que sous la schlague. Sans adrénaline, sans la trouille et la faim pour lui travailler la tripe, il s'avachit sur les lauriers des ancêtres. C'est tout particulièrement vrai pour le Moderne, chez qui l'assistanat est une seconde nature en passe de remplacer la première. Même nous autres Unhappy Few qui dégueulons les temps présents n'y échappons pas. Toute notre haine, entretenue avec la maniaquerie d'un jardinier nippon, ne nous sauve pas de l'àquoibonisme, du dégoût qui paralyse et des compromissions dégueulasses. Pour redevenir des hommes à part entière, il nous faut bien plus que de la détermination face à la grisaille universelle. Ce qu'il nous faut, c'est une catastrophe à la mesure de notre rage d'en découdre. Culturellement, nous vivons "au milieu des ruines" ; mais les murs de notre taule politique, économique et médiatique sont, eux, encore bien debouts, épais, lisses comme des miroirs, et le reflet qu'ils nous renvoient de notre état misérable nous prive un peu plus de nos dernières forces vives.
Dans l'histoire de l'Occident, la tabula rasa a souvent été invoquée pour foutre par terre l'ordre garanti par le sceptre et le goupillon. Maintenant que nous étouffons au royaume du gode et du bifton, je Vous conjure de ne pas nous délivrer du Mal, bien au contraire. Donnez-nous l'occasion de nous y noyer pour renaître forts et droits.
Sainte Jeanne, donnez-nous une aventure. Une grande et noble aventure. Une aventure à la mesure de la France, comme celle que vous nous aviez donnée à l'époque de la guerre d'Algérie et que nous n'avons pas su apprécier. Faites que nous courions des dangers, que la vie devienne exaltante et dure, que nous oubliions nos comptes en banque, nos livrets de caisse d'épargne, nos chaînes hi fi, nos vacances, notre bougeotte, nos coucheries, nos barbituriques, nos prudhommes, nos normes européennes, notre traintrain planplan, et revenez alors, revenez sainte Jeanne, brandir votre étendard et vous mettre à la tête de ceux qui vous suivront. Il y en aura, sainte Jeanne, il y en aura. Et peut-être plus que nous ne pensons.
Bénéfices de la panique et de la prévention : la même merde qui continue, en bossant à la maison, en faisant ses courses sur Internet, en organisant des cyberapéros avec webcam et micros, jusqu'à ce que les zexperts nous permettent de reprendre la routine de nos pitoyables journées véllib-boulot-valium.
Bénéfices d'un massacre viral : effondrement des prix de l'immobilier/ diminution de toutes les formes de pollution/ paralysie de l'économie mondialisante, avec suspension probable de toute activité boursière/ règlement durable de la surpopulation, à l'origine du chômage, de la dépression, de toutes les maladies liées au stress/ coup de frein brutal à tous les phénomènes de migration/ implosion du contrôle étatique, propice à toutes les sécessions imaginables/ und so weiter.
Franchement, y a pas photo.
Alors, bien chère Marie, un bon mouvement : génocidez-nous, vite, bien, massivement. La disparition à petit feu et l'abâtardissement gangréneux, nous n'en pouvons absolument plus.
Amen, et merci.
16:02 Publié dans Marées Noires | Lien permanent | Commentaires (7)
Commentaires
amen
Écrit par : mokia | 13/09/2009
Espérons!
Écrit par : Xan | 13/09/2009
La prière du para revue et modifiée par Stag ?
Écrit par : Gustave Labrute | 14/09/2009
Alleluia !
Excellent votre blog :-)
Écrit par : ElleN | 14/09/2009
Visiblement un jour sans, un jour d'abandon, de renoncement.
Je préférais un jour sanG, la prochaine fois.
Un Ave Marie pour vous faire pardonner sera suffisant.
Écrit par : robespierre | 14/09/2009
livrez nous du mal, fort bonne idée
Écrit par : Julius | 14/09/2009
@ Gustave Labrutte, Je ne pense pas que Volkoff fut para... je pencherai plus pour une occupation au deuxieme bureau ...
Écrit par : Waterman | 19/09/2009
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