08/01/2010
CHAUD-FROID DE BANALITES SUR SON LIT DE BILE
° Le monde de Festivus est une garderie à ciel ouvert. Tout y est conçu pour infantiliser. Médias, penseurs et décideurs nous bombardent de messages sirupeux sur notre santé, parce qu'ils ne nous pensent pas capable d'en prendre soin nous-mêmes. La nourriture industrielle pour adultes se calque sur les penchants instinctifs des moutards pour les aliments mous, sucrés et gras nécessaires à leur développement. La bouffe autoproclamée haut-de-gamme n'est plus qu'une branlette pour les yeux et les papilles, où l'on bouffe de l'azote, de la crème de rien parfumé à l'eau plate, présentée sur des assiettes vides où serpentent de ridicules arabesques de sauce décorative. Les formes des bagnoles s'arrondissent, se transforment en gigantesques jouets. Le langage est méthodiquement simplifié, bêtifié, expurgé de ses complexités, afin que les déficients comprennent la même chose que les plus avancés. L'individu est déresponsabilisé, encadré, coaché, surveillé, corrigé, rééduqué, on va même jusqu'à lui expliquer qu'il ne pense pas vraiment ce qu'il pense si ça n'est pas présentable en public. Comme la totoche fait taire le gosse qui hurle, le tsunami de marchandise à crédit est utilisé pour réduire au silence les masses vagissantes, dont les catégories les plus agitées ne savent d'ailleurs pas s'exprimer avec plus de cinquante clichés et une poignée de formules creuses. Comme dans un jardin d'enfants, toute autorité emballe des ordres non-négociables dans un langage sirupeux, des sourires à l'emporte-pièce, le ton condescendant qu'on emploie avec un mouflet récalcitrant et un peu con. Et malgré ce tir de barrage quotidien contre ce qui nous reste de droiture, nous parvenons encore à ressentir, ça et là, cet étrange sentiment d'inachevé, cette honte sourde d'échouer à nous rapprocher d'un idéal grotesque d'âge adulte et de pleine réalisation de notre potentiel.
° La plupart des avancées technologiques censées nous faciliter la vie en accélérant le temps perdu à des tâches secondaires, n'a fait qu'accélérer le rythme d'une vie toujours plus absurde, sans que l'on y gagne la moindre compensation. Les machines supposées abattre du boulot pour l'homme et lui permettre de jouir de plus de temps libre, lui ont imposé leur propre logique et leur propre rythme. Nous pourrions passer deux jours sur trois à ne rien foutre pendant que des automates se chargent des tâches abrutissantes ; mais l'espèce humaine a trop la trouille du temps libre, tout particulièrement le toubab. Il a encore et toujours le culte du Bosseur, il croit toujours que tout fonctionne au mérite, il estime que se flinguer la santé physique et mentale pour un DRH est pleinement justifié, et que le véritable réconfort pour tant d'efforts consiste à se goinfrer de gadgets, à se carboniser le cuir près d'un palmier et à masturber le chrome de voitures de courses qui ne verront jamais le goudron d'une piste. Et il faudrait considérer ça normal. Il faudrait ne pas devenir résolument marteau en pensant qu'il n'y a pas de moyens d'échapper seul à ce fast forward collectif parce qu'on ne peut compter sur personne. Il faudrait s'y faire parce que ceux qui le refusent sont des parasites sociaux, des glandouilleurs, des immatures et des idéologues de souk. Il faudrait renoncer à gueuler que nous crevons tous dans une bétaillère, parce qu'à chaque fois, il se trouve dix connards satisfaits et cyniques pour vous défier de survivre dehors. Et il n'y a rien à leur répondre parce que l'on sait parfaitement le nombre de jours que l'on pourrait tenir loin du Grand Hospice Occidental. Au dégoût de l'impuissance à l'intérieur s'ajoute la certitude mortifiante de n'avoir pas d'autre avenir que celui d'une ouvrière dispensable au sein de la ruche. Alors, pendant quelques secondes, on se relâche et on écoute un instantla mélopée des sirènes soraliennes, en se disant que les crouilles, aux moins, ont al-qaeda pour les seconder dans une ultime oeuvre d'autodestruction inutile mais flamboyante.
22:16 Publié dans Marées Noires | Lien permanent | Commentaires (6)
Commentaires
« on va même jusqu'à lui expliquer qu'il ne pense pas vraiment ce qu'il pense si ça n'est pas présentable en public »
C'est particulièrement manifeste avec la phrase « Le racisme n'est pas une opinion, c'est un délit ». Une manière de faire oublier que le racisme est une opinion ET un délit (au regard du « droit » français). Et donc qu'il existe un délit d'opinion au pays auto-proclamé de la liberté d'expression. Est-ce pareil en Suisse ?
Écrit par : Criticus | 08/01/2010
Bien sûr. Pourquoi échapperait-on au phénomène ? Cette sortie idiote n'est qu'un moyen de ne mener un débat qu'entre gens présentables. Les trépanés qui en usent sont les mêmes qui, dans d'autres circonstances, appellent à violer la loi en prônant la "désobéissance civile"... Tellement égocentriques et convaincus de leur supériorité morale qu'ils définissent même ce qui est légal ou non selon leur échelle de valeur...
Souvenir d'une file d'attente à une caisse quelconque. Devant moi, une mère et son mouflet, six ans maxi. A la hauteur du gosse, moult jouets clinquants. Réaction immédiate !
- Maman, maman ! Je veux ça !
- Mais non, tu ne veux pas...
Ou comment résumer la démocratie mixocrate en pas cinq secondes.
Écrit par : Stag | 09/01/2010
Le credo économiste "le travail est source de richesse" n'est pas une croyance passive comme celle des déistes, c'est un militantisme zélé et prosélyte. Par la division du travail, le clergé économiste tente d'annexer la vie (la vraie, celle du jeu, le nôtre, Européens) au travail. Le quotidien, considéré comme temps de travail est odieux, insupportable. Pour cette simple raison je hais les libéraux, les jacobins, les marxistes, les islamistes, les étatistes, les droidelhommistes et tous les enculés de cette croyance folle pour qui la soumission à la religion du travail est "gage de réalisation"... les salauds!
Désacralisons le travail toujours et encore.
Écrit par : Ns | 09/01/2010
"La plupart des avancées technologiques censées nous faciliter la vie en accélérant le temps perdu à des tâches secondaires, n'a fait qu'accélérer le rythme d'une vie toujours plus absurde, sans que l'on y gagne la moindre compensation."
Vous plaisantez ? Maintenant, grâce au ouèbe, les ados peuvent se branler peinards sans avoir à se faire choper en train de faucher des magazines de cul au kiosque du quartier. Une véritable révolution sociétale !
Écrit par : snake | 10/01/2010
J'ai du mal à lire un texte qui débute par "Festivus" ou qui invoque son nom depuis quelques temps. J'ai lu trop de merdes de branlos incultes qui citent le pauvre Philou à tort et à travers pour encore pouvoir lire "Festivus" sans me dire aussitôt :"c'est cuiquiledit quiyest !"....... tant la récupération de ce terme s'est fait rapidement.
Mais évidemment je ne met nullement en cause votre texte, qui est fort plaisant, oeuf course ;)
Écrit par : Hegel | 14/01/2010
Bravo, très beau texte
Écrit par : Occident Oxydé | 14/01/2010
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