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16/09/2011

BABY-SITTER

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Téléphone au milieu de la journée. L'ami Vlad.

Tu peux venir garder la petite ce soir ? On sort. C'est un peu imprévu je sais.

Ben oui qu'on peut, Vlad. Je ne suis pas sûr de comprendre l'urgence mais on peut. Pas trop poser de questions.

Sur place, on nous briffe rapidosse : Anatole, fils de Guilliermine, a son annif' ce soir même. Guilliermine pensait l'emmener au resto, soirée mère-fils, lâchez une larme. Or Anatole a sonné en douce son géniteur, Ülrich, très désireux de le convier à la mangeaille. Ülrich a quitté le domicile conjugal depuis quelques lustres, s'autorisant ça et là à y revenir dormir, et pas sur le canapé-lit, on ignore ce qu'en a pensé Fantine, nouvelle feniaule d'Ülrich, on lui souhaite de ne pas avoir été mise au jus. Les relations entre Guilliermine et et Ülrich, depuis ce temps? *Compliquées* [insérer sourire jaune ici].

A la même table de la belle famille unie autour du bonheur de leur lardon, qui voilà ? Björn, le nouveau sextoy bipède de Guilliermine, bien sûr. Enfin ex-nouvel-ex, quelque chose comme ça ; l'avait envie de vaquer à d'autres cuisses, aux dernières nouvelles. Je suis foutrement mal informé.

Guilliermine est une femme moderne, libérée des carcans du patriarcat fâschÿste, qui fait ce qu'elle veut de son corps et gère sa famille sans besoin de l'aide de personne. Si elle a lu la presse féministe des années 90, elle n'a sûrement pas oublié que les familles recomposées, c'est du velours enrobé de sucre, qui fait baver de jalousie cancérigène tous les couples 0.1, même qu'ils s'en sortent bien mieux parce qu'au moins, avec eux, y a pas tous ces sales tabous au sujet des infidélités de Donneur-de-Sperme ou de la naïveté de Donneuse-d'Ovule.

Ce qu'on vous explique pas, dans Féminaze, c'est que le progrès, la décomplexion joyeuse, la décolonisation de l'imaginaire, ça paraît marrant de l'extérieur mais une fois qu'on y a plongé, c'est plutôt saumâtre comme eau. Un peu comme un plug anal : une fois que c'est mis, le gadget érotique vachement caliente se transforme vite en un truc qui fait mal au cul d'une conne qui s'est rarement senti si... eh bien conne.

Souffler les petites bougies entre les représentants de l'Ancien régime - avec qui aucun traité de paix n'a été signé - et du Nouveau, goguenard et je-m'en-foutiste, Guilliermine, au moment de rejoindre la cantine, ça lui donne comme des reflux.

Alors elle fait ce que fait quiconque chute par mégarde dans la fosse à purin : elle sonne des potes pour leur faire généreusement profiter des miasmes. Quand on pue à plusieurs, c'est un peu comme si on poquait moins soi-même. Bonnes pâtes, Monsieur et Madame Vlad accourent à la sauterie, puisqu'on accepte de garder Vladounette pendant qu'ils vont se payer du bon temps en chouette compagnie.

J'ai l'air, comme ça, de sarcasmer, de condamner, de moraliser la famille Made in Pétain comme panacée et la lapidation des traîtresses qui refusent de se dessécher en silence dans un mariage raté, pour ne pas déranger le bel ordre du Lebensborn. C'est pas ça.

Je l'explique longuement à Vlad quand il revient de sa soirée en apnée. Je lui dis qu'il n'y a pas de mariages "réussi", que la famille est un étouffoir, que nous sommes virtuellement tous condamnés à l'échec vu les circonstances, etc.

J'ai eu mon compte, merci beaucoup, de relations bancales, d'arrangements piteux qu'on s'autorise par tristesse, par épuisement, par désir inconscient de descendre encore plus bas dans la boue pour s'y enivrer à s'en évanouir.

Je JUGE PAS, comme on dit avec angoisse chez les Amis-du-Peuple.

Je m'étonne juste qu'on puisse à la fois se comporter comme le dernier des égoïstes, avec son seul plaisir malsain en vue, et dans le même temps se respecter si peu qu'on puisse ainsi perdre toute dignité, pour maintenir une fiction d'unité à laquelle le gosse ne croyait déjà plus avant de savoir articuler son mal-être.

Tout pourraît être foutrement plus simple, moins glauque, moins ridicule.

La brûlure persistance du ridicule, voilà la clé de tout le bousin. Le programme ultime de protection contre les mauvais choix à répétition.

Ne s'occuper que de son propre cul, quitte à fourrer celui de tous les autres, potes et familles confondus, ça veut logiquement dire qu'on n'aime vraiment que soi. Je crois encore, naïveté cro-magnonne je présume, qu'on protège naturellement, spontanément ce qu'on aime. Que si l'on n'aime que soi, on ne s'explose pas volontairement à la honte, à la gêne, à cette conviction muette mais impérative que tout est complètement de traviole alors qu'on pensait se la jouer décontracté, pas-prise-de-tête. L'épiphanie du ridicule devrait fonctionner à tout jamais comme une infranchissable barrière d'anticorps. Devrait.

On ne peut même pas compter sur le ridicule, faut croire.

Commentaires

Ouais ; l'autre jour une collègue -c'est une pute- causait avec une autre collègue -une autre pute- devant moi, la première disant à la seconde qu'elle s'inquiétait pour son môme parce que son ex (père de l'enfant) vient de rompre avec sa troisième régulière et que question équilibre pour l'enfant je suis pas sûr que ce soit très sain.
Que la putasse, âgée d'une trentaine finissante, ne soit pas dérangée le moins du monde par son goût répété des baisouilles de passage (avec ciblage privilégié sur les moins clairs d'entre nous) ne semblait pas entrer en ligne de compte "pour le nenfant".
Tout le monde semble vivre avec joie dans une de ces innombrables séries télé (à croire qu'il y en a 20 nouvelles chaque année)...
Suum cuique, n'est-ce pas.

Écrit par : GAG | 16/09/2011

Vous avez quel âge Stag ?

Cela faisait longtemps que j'avais pas lu un texte aussi poignant

Donc si je vous comprend bien, il n'y a pas d'espoir, c'est ça ?

Todomodo m'a dit un jour que les femmes occidentales souffraient d'être "porno sentimentales". C'est à dire incapables de la jouer vraiment salopes et toujours désireuses d'une certain sécurité "monogamique" d'essence chrétienne.

Je crois que vu de la France, la situation est encore très différente de la Suisse.

Nous battons tous les records de la misère sexuelle avec les pays du Maghreb.

Écrit par : Fascisme Fun | 17/09/2011

La trentaine bien tassée.

Je ne sais pas, franche causer, s'il y a espoir ou pas. J'ai enterré cette question avec bien d'autres sous des tonnes de caillasses. Envisager l'existence et l'activisme perso comme une randonnée : on a beau être crevé, écoeuré, n'en pouvoir absolument plus, il faut bien continuer, aller jusqu'à l'étape, puis rentrer à la piaule, parce qu'il n'est pas imaginable de dormir au pied d'un arbre. Ca ne demande pas d'espoir, juste de l'endurance, de l'acharnement bestial, et puis un peu de dignité aussi, pour ne pas rebrousser chemin ou appeler la Rega...

Il doit exister une forme animale, primitive, subconsciente d'espoir. Ca a le goût d'un mélange de rage, de déni, de dignité bafouée, d'obsession de vengeance, d'aveuglement mystique, de certitude catégorique d'avoir raison, quand bien même on aurait raison trop tard et contre l'univers entier. Cette force-là, assez hideuse et effrayante, il n'y a qu'elle pour permettre de continuer à se cravacher au sang pour conserver sa dignité, pour suivre en titubant un code d'honneur en mille morceaux, et rêver encore de se redresser totalement dans un monde de tordus.

Lisez Takimag parfois ? J'aime bien la conclusion de Derbyshire quant aux commémorations de mes balles du 11 septembre :

My own answer to the opening question is the one I gave nine years ago, at the time of the one-year anniversary: defiant normality. I recommend it to the nation at large.

http://takimag.com/article/nothing_to_commemorate

Je crois que c'est une recommandation qui vaut pour notre quotidien à tous : continuer à construire sa vie et son clan comme si tout autour de nous n'était PAS déjà foutu, mort, pourri irrémédiable. Ce qu'il peut nous rester d'estime de nous-même le commande.

Écrit par : Stag | 17/09/2011

Je ne l'aurais pas dit exactement dans vos termes mais j'approuve sans réserve votre texte (ce ridicule qui loin de tuer est brandi comme un étendard! ou étalé abondamment sur nos tartines de Bien Vivre Ensemble) et votre commentaire: le fait qu'il faille tenir d'une manière ou d'une autre pour les siens.
La dignité qui manque en effet beaucoup aux femmes d'aujourd'hui me semble t-il.Aux hommes aussi.Cet ingrédient tout simple d'une bonne recette éducative, avoir "un peu de dignité", dites-vous justement, voilà ce qu'il faut transmettre à nos filles.

Écrit par : la crevette | 18/09/2011

Salut Stag,

Merde. La baffe. Il fait mal ce billet parce que c'est la vérité toute nue en plein dans la gueule.

90% de mes connaissances sont des Guillermine ou des Ulrich. Certains s'en sortent très mal, d'autres moins.

A qui la faute ? Je me suis toujours demandée si j'allais pouvoir échapper à ça. Mais quoi foutre ? Ne pas pondre de mouflets ? On en fait quoi du besoin de perpétuer la race pour faire front sur le plan démographique ? Faudra qu'on en discute autour d'une entrecôte et d'une bouteille de Châteauneuf, puisqu'il faut bien ça pour rendre la vie plus tolérable.

Et on décapitera quelques coupables aussi.

Bis bald.

Écrit par : Naufana | 19/09/2011

"Il doit exister une forme animale, primitive, subconsciente d'espoir"

Vivant = en attente

Sinon = mort

C'est simple, merde.

Je rappelle qu'en espagnol, "attendre" se dit "esperar".

Écrit par : GAG | 20/09/2011

Et alors, j'ai envie de dire. Les enfants qui se plaisent dans la merde où ils sont nés y resteront. Les autres, personne ne les empêchera d'aller élever des moutons en Islande, aux Malouines, ou derrière le Suchet.
Enfin, ça c'est s'ils arrivent à se retenir de lever une armée pour aller envahir un bout de France ou quoi que soit d'autre.

Écrit par : LeCalmar | 08/10/2011

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