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14/06/2013

LA CUVEE DES CONNARDS

Bekim (Benn) et Ilir Frrokaj ont acheté en juin 2012 plus de 46'000 dollars un magnum de Domaine de la Romanée-Conti du millésime 1945 au chef du célèbre restaurant Charlie Trotter, maintenant fermé, à Chicago. Les deux hommes ne se sont aperçus que la bouteille n'était pas authentique que lorsqu'ils ont voulu l'assurer et qu'une consultante leur avait dit qu'elle n'avait aucune valeur.

Les deux richissimes imprononçables n'achetaient pas du vin, au sens d'un produit de consommation destiné à flatter les papilles et griser l'âme au bout de quelques godets. Il y a un prix au-delà duquel on n'achète plus quelque chose qui se boit, mais du prestige, de l'exclusivité, de l'esbrouffe.

Une pute sympa, une très belle pute, une pute top-model, la plus belle femme du monde pute-d'un-soir, au final c'est pareil: mêmes orifices convoités, mêmes services attendus. A quelques euros ou cent mille dollars, une pipe reste une pipe, tout le reste est de la poudre, du genre qu'on s'enfile par les yeux plutôt que dans les naseaux. Pour le vin c'est exactement pareil. Il y a la qualité du millésime, la spécificité du terroir, le travail du vigneron, le savoir-faire de l'encaveur, et tout cela a un prix. Rajoutez-y une marge pour que les artisans gagnent leur croûte décemment. Encore une pour faire vivre les intermédiaires. Une dernière pour la relative rareté du cru. Chaque centime supplémentaire sera dépensé au seul nom de la spéculation.

L'amateur bourrin mais éclairé calcule le juste prix de son jaja selon une échelle à trois variables: qualité, prix, et temps. Une bouteille, c'est X verres répartis entre X convives pendant X minutes d'une seule soirée. Au-delà d'une limite supérieure variable mais incontournable, on ne boit plus du vin: on flambe, comme au casino. Au plaisir de la dégustation se substitue celui de la frime. Une grasse liasse qui disparaît à chaque petite gorgée.

Le palais humain a ses limites, et pour les franchir il faut avoir recours à des substances hallucinogènes. Sans elle, on boit et mange excellement, mais on n'a pas de visions célestes, pas d'orgasme sec. Et puis au bout d'un moment on a simplement trop bu et trop mangé, et on finit par tout dégueuler, pareil qu'avec des chips et un litron de goron.

Ami novice, n'oublie jamais ceci: le vin le plus cher de la carte ne sera pas le meilleur, juste le plus cher. Et à partir du deuxième zéro au cul du prix, la courbe du foutage de gueule prend son envol. Mais les gros snobs ne veulent pas le savoir.

C'est ce qui explique notamment la renommée perpétuelle des "grands vins de Bourgogne": c'est connu ? c'est monstre cher ? c'est coté en bourse ? ça ne peut être que bon.

Si vous consentez à débourser le prix de quatre Ducati Monster neuves pour un litre et demi de rouquin, on peut aussi bien remplir votre magnum avec du cubi de beaujolpif nouveau 1985 aromatisé au sirop de cassis :

VOUS ALLEZ AIMER

Vous n'aurez pas le choix que d'être ébloui, de faire claquer la langue, de vous chiffonner la gueule en moue de connaisseur étourdi de bonheur.

Un intense plaisir gustatif est le retour sur investissement légitime que vous attendez. Si vous avez l'impression de vous rincer la gueule au vieux vinaigre de framboise, la sensation qui vient juste après la brûlure de l'acide s'appelle la honte : vous êtes un couillon qui s'est fait avoir, un richissime blaireau qui n'y connaît que dalle, une pive, un manche, un futur client de Monsieur M'Bougna, Grand Voyant Médium qui multiplie les billets de mille et fait revenir l'être aimé du royaume des morts.

L'admettre publiquement ? Plutôt crever. DONC ce que vous buvez est formidable et les moqueurs sont des béotiens aux papilles néanderthaliennes.

Brankim Foutraj et son copaing ont joué et perdu. Dans un monde juste, ils ne devraient avoir droit à que dalle à part les rires du public. L'arnaqueur a fort bien joué son coup, parce nos deux couillons n'auraient pas senti la différence avec le premier jus de betteraves venu.

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Commentaires

« ce magnum était contrefait “parce que le Domaine de la Romanée-Conti n'avait produit que de petites quantités en 1945 et non des bouteilles magnum de grande taille de ce millésime” »

Tiens, et pourquoi ce domaine n'avait produit que de petites quantités en 1945 ? Qu'est-ce qui pouvait bien freiner la production, à l'époque ? Je serais prêt à parier que ni les « collectionneurs », ni le journaleux de l'AFP n'y ont pensé.

Écrit par : Criticus | 14/06/2013

La faute aux nazis, une fois de plus.
Ah sacreubleuh. N'oublions jamais, machin.

Écrit par : stag | 14/06/2013

Ah, moi j'allais dire la faute aux Alliés, mais je dois faire du mauvais esprit. ;-)

En tout cas, il y avait des tickets de rationnement jusqu'en 1949. Donc le vin...

Écrit par : Criticus | 14/06/2013

de toute façon un vin de 70 ans d'age c'est imbuvable.

Écrit par : Paul-Emic | 14/06/2013

Le vin de 88 ans est buvable.

Écrit par : SSI | 14/06/2013

les cuvées vraiment exceptionnelles conservées dans d’excellentes conditions peut-être, mais passé une trentaine d'années même pour les bonnes années, il commence à y avoir vraiment du dépôt.
Après je rejoins l'auteur, c'est bien plus du snobisme que de la dégustation de bon vin.

Écrit par : Paul-Emic | 15/06/2013

"de toute façon un vin de 70 ans d'age c'est imbuvable."

Un tokaj hongrois dure 300 ans si on en croit la légende, et j'aime imaginer que le mien durera mille ans (même si je ne serai pas con au point d'attendre jusque là).

Écrit par : Le blaireau-garou | 16/06/2013

"si on en croit la légende"

Écrit par : Paul-Emic | 16/06/2013

"Un tokaj hongrois dure 300 ans "

Arrêtez donc de vous masturber, vous êtes fatigué !!

Écrit par : Obsédé Textuel | 19/06/2013

Il y a quelques années, une bouteille de Château Chalon, ou Etoile, je ne me rappelle plus, Jura, vin jaune, avait été dépucelée et dégustée. Certains même pleuraient de voir dette bouteille se vider.Il me semble que certains voulaient d'abord décanter le vin, d'autres y étaient totalement opposés. Beaucoup discutaient autour de cette bouteille, rappelant quelles étaient les conditions de vie de l'époque, la technique pas ou peu évoluée...
Ce vin avait une bonne centaine d'année, et il était... difficile de le qualifier, même pour des professionnels.

Ainsi que le rappel Paul Emic, les très bons vins ne se gardent que peu de temps, 30/35 ans; exceptés certains vins de Bordeaux, rouge ou blanc, qui peuvent atteindre 50 ans.

Seuls, certains vins Jaunes du Jura dépassent facilement les 50 ans

Écrit par : blh | 20/06/2013

Tiens, puisqu'on parle de vin jaune du Jura, il y a une recette qui me fait rêver depuis des années mais que je n'ai jamais pris la peine d'essayer (il faut un Mont d'Or entier et quand j'en ai un sous la main, je préfère le tartiner, surtout depuis que je vis dans une contrée où le vrai fromage est un luxe) :

MONT-D'OR CHAUD AU VIN JAUNE

Pour 4 personnes

1 Mont d’Or
16 pommes de terre Charlotte
50 cl de vin jaune du Jura

Faites cuire les pommes de terre en robe des champs, puis coupez-les en rondelles. Beurrez le fond d’un plat à tarte et faites un lit avec les rondelles de pommes de terre. Posez le mont-d’or dessus, en ayant pris soin de retirer la boîte en bois, en conservant cependant son tour d’écorce de sapin. Creusez le centre et remplissez le trou de vin jaune ; refermez avec le bouchon de fromage.

Enfournez et faites cuire sur position gril, jusqu’à ce que le mont-d'or soit fondu.

Boisson conseillée : un vin jaune du Jura.

Écrit par : Criticus | 20/06/2013

Ehhhh, ça m'intéresse, j'ai déjà le jaune.
merci bien.

Écrit par : blh | 21/06/2013

plié de rire

ceci dit, j'ai hérité du défunt beau père, une cave d'anthologie qui remonte aux début des années 30 ( vous savez , les zeurléplusombre....) , elle même héritée de son beau père....

la plupart des bouteilles ont un look très vintage , si on peut dire, avec poussière, toiles d'araignées et moisissures .....

ma femme , alarmée par ma propension à vider tout ce qui passe à portée,m'a formellement interdit d'y toucher , au motif que "boire son capital , c'est une innanité en ces temps de crise , attend un peu de valoriser ce capital"

m'est avis,; que le dit capital est , à cette heure bien dévalorisé....j'en ai ouvert une , l'autre mois, la couleur , orange, la saveur , étrange.....


croyez vous que je puisse trouver un pigeon niouyorquais ou londonien ou moscovite à qui refourguer le lot ?

Écrit par : tibor krasznahorta | 24/06/2013

ça doit se trouver surtout si les bouteilles proviennent d'un vignoble (re)connu

Écrit par : Paul-Emic | 24/06/2013

Les commentaires sont fermés.