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03/11/2014

REGRETS, REMORDS ET FARIBOLES

"Je préfère avoir des remords que des regrets".

C'est jeune, faut excuser.

Comme si c'était possible de choisir, petit con.

Comme si c'était imaginable de ne jamais accomplir aucun geste, prononcer aucune mot, prendre aucun engagement qui jamais ne s'avère mauvais, ou idiot, ou irréfléchi. Ce n'est pas juste gonflé, c'est un peu humiliant. Pour ne pas faire d'erreur, il ne faut jamais rien entreprendre ; pour ne pas reconnaître ses erreurs, un sévère handicap mental est un gros atout. Le bel aveu.

Des regrets, tu en auras, jeune con. C'est l'équivalent spirituel de tes articulations qui se grippent, de tes gueules de bois toujours plus impitoyables, de ta vue qui baisse, de tes cheveux qui se raréfient. C'est la balafre du temps qui passe, qui fait une belle patine chez certains êtres et des crevasses suintantes chez d'autres.

Ne pas oublier qu'on peut regretter d'avoir fait quelque chose, mais aussi et surtout de ne pas l'avoir fait. Je ne crois pas avoir croisé à ce jour quelqu'un qui ait atteint son plein potentiel, qui ait systématiquement épuisé toutes les options qui se présentaient. Nous nous trimballons tous avec une fosse sceptique mentale où fermentent un certain nombre de lâchetés, d'excuses bidon, de micro-trahisons.

Au maximum, on peut essayer de tout assumer. C'est ce qu'il faut entendre quand quelqu'un affirme, à mi-chemin, qu'il "ne changerait rien" à son parcours jusqu'ici. Mais même ceux qui semblent avoir un destin moins pourrave que la moyenne peuvent fort bien n'en rien tirer de bon. C'est comme recevoir une Cadillac et être trop pétochard pour prendre la route.

Gros, gras, immense mensonge que cette prétention à la surdité face à la petite voix tripale qui dit : "Là, garçon, tu as merdé en ordre, et c'est trop tard pour rattraper quoique ce soit."

Commentaires

"Ne pas oublier qu'on peut regretter d'avoir fait quelque chose, mais aussi et surtout de ne pas l'avoir fait."


On peut ainsi, afin de ne pas le regretter toute sa vie, se mettre à réaliser un projet qu'on avait depuis tout jeune, quelque chose d'important qu'on s'était promis de faire avant qu'il ne soit trop tard. Et une fois fait, on regrette le tout parce que ça se passe plutôt mal, parce que finalement peut-être bien qu'on s'est trompé. Et on ne peut plus retourner en arrière, on est trop vieux maintenant, et on y a mis trop de temps, d'espoir et de fric...

Le genre de cas où les regrets auraient mieux valu que les remords mais si tu n'avais pas agi, tu te serais reproché toute ta vie d'avoir été un lâche, un fainéant et une grosse merde.

Tout ça pour dire que remords et regrets ont tous deux un goût parfaitement dégueulasse, que l'action équivaut parfois à l'inaction. Ce qui bien entendu, donne envie de reprendre une bière et de ne plus réfléchir du tout.

Écrit par : Lee van Croydon | 05/11/2014

Je recommande votre article.

Écrit par : se mettre | 05/11/2014

Bravo pour ce beau billet. Le Confiteor ne dit pas autre chose quand il assure que nous sommes tous pêcheurs.

Dans la religion catholique, selon la théologie thomiste, la contrition est « une douleur voulue de nos péchés jointe à la résolution de nous confesser et de donner satisfaction ». Celle-ci implique « une double douleur, une douleur de raison qui est la détestation du péché qu’on a commis, et une douleur de sensibilité qui est la conséquence de la première ». (Source Wikipédia).

CONFITEOR
Je confesse à Dieu tout-puissant,
Je reconnais devant mes frères
que j’ai péché,
en pensée, en parole, par ACTION et par OMISSION.
Oui, j’ai vraiment péché.
C’est pourquoi, je supplie la Vierge Marie,
les anges et tous les saints,
et vous aussi, mes frères,
de prier pour moi le Seigneur notre Dieu.
Que le Dieu tout-puissant nous fasse miséricorde, qu'il nous pardonne nos péchés,
et nous conduise à la vie éternelle.
Ainsi soit-il.

Votre "petite voix tripale" rejoindra-t-elle un jour la "petite voie" thérésienne ?

Écrit par : castoretpollux | 06/11/2014

@ "se mettre" : merci. Moi aussi, je le recommande. Vivement, même.

@ Castoretpollux : l'idée du pêché originel me déplaît fondamentalement, et la perspective d'une résurrection, donc la prolongation de tout ce jeu de con, m'horripile. La boutique catho a relativement peu de choses en stock pour moi.

Après, je suis assez partagé. L'actuel "guilt trip" aryen aurait-il pu prendre racine si facilement et profondément sans cette doctrine chrétienne de culpabilité congénitale ? Et que d'ennemis de notre civilisation chez les chrétiens modernes ! Bloy recommandait qu'on recherche Jésus dans les ordures, ses descendants croient l'avoir trouvé dans les bas-fonds d'Haïti.

On observera à l'inverse que, des millénaires durant, se vautrer aux pieds du Christ n'empêchait pas d'éventrer des ennemis exotiques - jusqu'à l'exemple contemporain d'un Degrelle, n'est-ce pas. Et puis, une "secte du désert" mérite-t-elle encore un tel épithète après plus d'un millénaire de présence sur le continent ? Une religion au nom de laquelle on a construit la Sainte Chapelle ou composé le Miserere d'Allegri ne peut pas être complètement mauvaise.

Et puis il y a une constance très dérangeante chez les contempteurs de l'église à inclure dans leurs vomissure toute idée de tradition propre aux Toubabs. Le schéma est trop récurrent pour ne pas être révélateur. Reste à savoir de quoi très exactement, et à ne pas tomber stupidement dans le plan "les ennemis de mes ennemis etc."

Ma religion n'est donc pas faite, littéralement.

Écrit par : stag | 06/11/2014

Il existe sur cette difficile question "religieuse" ( mais surtout civilisationnelle) un texte amusant de Maurras "Je suis romain"
http://www.actionfrancaise.net/craf/?Je-suis-Romain
Remy de Gourmonta écrit des choses passionnantes sur notre romanité, prouvant que les grands papes de la Renaissance férus de Virgile, Catulle et de peintures à sujets mythologiques avaient pleinement conscience d'être les successeurs des Pontuifex maximus de Rome. Grégoire le Grand conseillait toujours de christianiser les dieux et leurs "églises". Jusqu"ç *priape devenu Saint Vit ! (authentique).Pour certains -comme moi - la religion c'est Dun Scott, Eckhart, bref, une gnose. Le péché originel c'est plutôt la constation que l'homme ne naît pas empli d'instincts superbes...
Bon, pour musarder, quelques phrases de cet athée (comme Maurras d'ailleurs) de Gourmont :
Très peu d'hommes peuvent vivre dans la liberté ou dans le doute, ce qui est la même chose. II faut au peuple une foi ; il le sent, et il veut croire. Il s'enquiert même de la qualité de la croyance, qui n'a aucune importance réelle pour lui, car ce qui lui est utile dans la croyance ce n'est pas, comme il se l'imagine, son contenu, mais la méthode qu'elle implique. Le peuple a besoin d'un principe d'action ; or, le doute n'est pas un principe d'action ; ni la formule politique du doute, qui est le libéralisme. Il faut au peuple, et par peuple j'entends tous les hommes qui vivent pour vivre, un catéchisme universel : comment manger, comment s'habiller, comment penser, comment aimer. Ceci est-il bien ? Ceci est-il bon ? Ceci est-il vrai ? Ceci est-il du nord ? Ceci est-il de l'ouest ? La liberté le jette dans un embarras immense. Ou bien, plus ahuri que l'âne de Buridan, il louche éternellement vers les deux picotins ; ou bien il se jette en des actes contradictoires et burlesques. Que l'on regarde le seul pays où existe vraiment la liberté religieuse, les Etats-Unis : c'est un amas de sectes dont le seul but semble la culture intensive de la bêtise humaine. De toutes les libertés inutiles au peuple, la plus inutile est la liberté religieuse, et c'est la plus dangereuse aussi. " cf http://www.remydegourmont.org/de_rg/oeuvres/epilogues/textes_1903.htm

Écrit par : Restif | 08/11/2014

Allons allons, ami Stag
Ce n'est pas la secte du désert qui a construit la sixtine, celle d'Aix ou peint les Giorgione, les Véronèse et tous le bataclan
On pourrait dire que ça s'est peint et fait contre elle
C'est, bien au contraire, les hommes produits par le continent européen, en dépit des famines, épidémies et baston diverses qui ont produit ça
Contre la doctrine originelle de la secte du désert qui, elle, prônait abstention, frugalité et tout le merdier dégressif des zecolos d'alors
Les purs de la secte d'ailleurs ou les ceusses qui s'y retrouvaient comme ces cons de luthériens, on ravagé tout ce luxe ostentatoire
La foutue secte des coupeurs de bout de zob et d'égorgeurs de mouton qui comme tous les emmerdes nous vient du cul du monde, a été en quelques sorte, européanisée
C'est uniquement comme ça qu'on peut la tolérer ou qu'on a pu la tolérer si longtemps

Écrit par : kobus van cleef | 11/11/2014

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