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22/01/2009

INDIFFERENCE

Peu de choses à rajouter au dernier billet du méchant Xyr, définitif comme souvent.

Au moment où le Vent de l’Histoire soufflait sur l’homme le plus intelligent et le plus sexy du Monde-dit-Libre, j’étais au bistrot, en tête à tête avec de la bibine. La radio éructait un fameux porridge, où se mêlaient caquetages féminins, pop indéfinissable et bulletins météo. Perdue parmi les bouteilles et les percolateurs, une petite téloche transmettait des images muettes d’Oncle Tom Superstar et des millions de lemmings venus chanter son avènement. Vu comme ça, l’investiture avait des airs de pantomime dérisoire, un truc sans importance qu’on laisse scintiller sur l’écran, pareil qu’un match de tennis qui n’intéresse aucun habitué. Ca remettait assez bien la mosquée au milieu du souk : non-événement suivant, please.  

Quand mes descendants métissés et festivocitoyens me demanderont où j’étais et ce que je faisais le premier jour de l’Ere Nouvelle, je leur dirai que je buvais de la bière en me contrefoutant de tout, et surtout de l’investiture d’un type beige. J’espère qu’ils auront honte d’avoir un père aussi con. Selon mon taux d’alcoolémie, je tenterai de leur expliquer les raisons profondes de mon indifférence. D’ici-là, peut-être les aurai-je comprises, parce que pour l’instant elles m’échappent. La politique internationale m’intéresse un peu plus que le sport, dans la mesure où j’en cause volontiers avec les gens – alors que les résultats de tel ou tel match, rien à foutre. Pourtant, quand je vois Gaël Monfils ou Jo-Wilfried Tsonga, ça m’agace alors que la face de Bourrique Obanane, rien, pas le moindre spasme de haine. En cette fin de journée, il y avait des petits culs beaucoup plus intéressants à observer aux alentours.

Une explication pourrait être que je succombe au phénoménal charisme du personnage. Le patriotisme franchement assumé, les drapeaux qui claquent au vent, les foules immenses rassemblées devant une tribune, les slogans simplistes, la Nation qui agite la queue en entendant la voix de son maître, tout ça devrait titiller ma nostalgie des Heures Sombres, logiquement. Mais ça paraît un peu gros, ce doit être autre chose.

 

BlackJesus.jpg

Une autre explication résiderait dans la force du programme du personnage. Mais sauver le capitalisme financier et l’industrie de la bagnole, ça me file pas d’érection notable. Fermer Guantanamo pour recaser ses prisonniers ailleurs, je suis pas sûr de trouver ça très utile. Aggraver les peines pour les « crimes de haine », interdire le port d’armes dissimulées, régulariser les clandestins s’ils paient des impôts et causent anglais, renforcer l’Otan, ça modère sévèrement mon envie de meugler Yes Oui Ken. C’est donc pas ça non plus.  

 Une dernière explication serait que la chose est effectivement un non-événement, et pas que pour moi.

 Pas un mot de la part des gens croisés ces derniers jours. Pour X, les Etats-Unis « ont élu leur grand sorcier » - suite de quoi il m’a parlé des camions de la Route 66 pendant une bonne heure. Y, pendant l’apéro, a surtout parlé de cul, comme à son habitude, spécifiquement d’une ex qui va finir par passer à la casserole si elle ne se calme pas. Z s’inquiète essentiellement de l’avenir de la boîte, dont la santé phynancière ne bénéficie pas encore  - Ô injustice et incompréhension – de l’Effet Obama. Ma feniaule, qui n’aime pas les wacisses sauf moi et encore ça dépend des jours, semble avoir été au courant du happening présidentiel, mais s’est comportée de manière tout-à-fait classique. Mes géniteurs, assez pointus sur l’actu internationale, s’intéressent surtout à Gaza. Malgré la relative froidure de ces derniers jours, aucun Noir-Ou-Presque croisé sur le bitume ne portait de gants noirs fièrement levés face au ciel incrédule. Quant à mon taux de mélanine, il est toujours aussi désespérément stable.

 The world keeps turning.  

Commentaires

J'aime vraiment beaucoup vos articles.

Écrit par : Pélicastre | 22/01/2009

Merci pour cette mansuétude, je fais de moins en moins d'efforts ces derniers temps... Retour d'ascenseur : compliments pour votre essai sur Oncle Adolf, père véritable de la modernité suicidaire et festive. Une ébauche sur le thème moisit dans mes tiroirs depuis des mois, je peux l'éliminer sans regrets à présent.

Écrit par : Stag | 22/01/2009

Ca me fait absolument le même effet. Une impression de non évènement absolu, de pur spectacle qu'on ne peut même pas décemment haïr. Je n'essaye même plus d'y réfléchir, ça me laisse vaguement dubitatif sur les raisons de mon vide (je me dis brumeusement que c'est le triomphe du Festivus de Muray, mais même ça n'arrive pas à me faire enfiler cochonnement deux idées sur la question).

La seule que j'ai vu hennir l'orgaasme c'est une brave quiqua noire que je fréquente depuis des années parce qu'elle se trouve secrétaire chez mon toubib. Alors elle, ça la met en transe. Je l'aime bien, elle vous prend dans des coins pour vous dire du mal des juifs, passe du vote trostkiste au vote frontiste dans le même mois, mais n'a de vrais bonheurs que quand on fourre la charogne de Dumas au Panthéon ou quand on enterre Césaire -plus grand poète de tous les temps passés et à venir. ALors là , pensez... Je suis bien content pour elle. Et je regrette de l'avoir déçu quand je l'ai vu car c'était la veille de l'investiture et quand elle m'a dit "Tu sais ce qui se passe demain" je n'ai su que la regarder d'un oeil bovin (lequel devient décidément ma principale expression depuis quelques temps). Encore quelqu'un que j'aurai déçu.

Écrit par : Restif | 22/01/2009

Décevoir est un plaisir des plus subtils. Surtout quand il s'agit de doucher quelque peu l'allégresse quasi-fanatique des obamaniaques. Les gogos dans ce genre ont leur utilité malgré tout, celle de nous divertir.

Écrit par : Benway | 24/01/2009

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