Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

12/12/2011

FAITES LA GUERRE A VOTRE MALHEUR

Plus tard encore, j'allai écouter Jean Cau aux Grandes conférences catholiques, à Bruxelles, à l'automne 68. On finissait à peine de repaver les rues du Quartier latin et les sociologues s'appliquaient à tirer des leçons de ce qu'on nommait pompeusement les "événements de mai". En attendant le conférencier, les abonnés parlaient à mi-voix de révolution sexuelle et se demandaient si, au fond, les jeunes n'avaient pas raison de vouloir faire l'amour et non la guerre. Ils faillirent tomber de leurs chaises quand Jean Cau mit en pièces ce qu'il appela ce "slogan judéo-chrétien". "Non! s'exclamait-il. Faites la guerre! Faites la guerre à vos lâchetés, à votre paresse, à votre inculture, à votre prétention, à votre malheur! Faites d'abord la guerre et l'amour vous sera donné de surcroît".

Beauté phénoménale de l'idée, et de la manière dont elle est amenée. Ne pas attendre quoique ce soit de bon de ce qui nous arrive, et batailler comme un Einsatzgruppen ramassé en un seul homme, pour reprendre à l'existence tout ce qu'elle vous fauche si vous ne faites pas gaffe à sa cleptomanie. L'équilibre et la bonne humeur traités comme la Liberté de Bloy, cette salope qui ne se donne qu'aux pourceaux et aux assassins, qu'il faut mener au lit à coups de bottes. J'aime. J'adore. Je plussoie. Je ne sais rien d'autre. Le bonheur envisagé comme la discipline martiale la plus aboutie.

Prenons Guilliermine, par exemple. Peu de choses lui manquent pour mener une vie pas trop pourrie. Bien balancée, relativement cultivée, certes un gauchisme inepte que quelques tatanes ne suffiront pas à guérir, soyons réalistes, mais quoi ? Qui n'a pas sa petite tare ? Son principal défaut : ne pas guerroyer pour aller bien.

Pour Vlad, c'est pareil, et pour toute la clique de déglingués qui m'entoure. Charogner jour et nuit pour limiter la casse, pour sortir la gueule des chiottes, pour bricoler de pauvres économies de savonnettes collées et de fractures ouvertes colmatées au sparadrap seconde main, ouiche, là c'est plutôt bon, pour se mentir en permanence aussi, pour être infoutu de comprendre Madame ou Monsieur et se convaincre d'être celui/celle qui se sacrifie le plus, jawhol, Weltschampionen ! Mais pour ne pas s'autofoutre de leur propre gueule et décider qu'aller pas trop mal et mener une vie qui ressemble à quelque chose, c'est autant une question de rage que d'hérédité, il reste qui ? Pas besoin des doigts de toute une main. 

Je pontifie pas, je constate.

Cau doit être le seul à avoir si bien cerné le problème et lui avoir donné un écrin, un piédestal littéraire à sa hauteur.

Refuser d'aller mal, de traîner le malheur, d'attirer les emmerdes, d'être convaincu de les mériter quelque part sous la conscience. Un merde jouissif, colossal, guerrier, viril, exubérant à la Fatalité.

Comment un type pareil a-t-il pu graviter autour de Sartre, putain ?

Commentaires

« Comment un type pareil a-t-il pu graviter autour de Sartre, putain ? »

Ben, l'alternative, c'était alors Raymond Aron qui s'excusait de respirer, donc on peut comprendre que le bigleux ait plus conquis ceux en quête de passion, fût-elle mortifère comme la sienne...

Écrit par : Criticus | 13/12/2011

"Faites la guerre à vos lâchetés, à votre paresse, à votre inculture, à votre prétention, à votre malheur!"

totalement d'accord

très bien dit

aucune foutue idée de la méthode adéquate pour seulement commencer

mauvaises habitudes accumulées depuis trop longtemps...

Écrit par : GAG | 13/12/2011

Oui, trop, trop, trop longtemps...

Écrit par : Gil | 13/12/2011

Aron qui s'excusait de respirer ! Mort de lol

Écrit par : Robespierre | 17/12/2011

Façon de parler... Mais on ne peut pas dire qu'il était radical, en toute objectivité... d'où l'attrait supérieur de Sartre.

Écrit par : Criticus | 17/12/2011

"Faites la guerre à vos lâchetés, à votre paresse, à votre inculture, à votre prétention, à votre malheur!"

aucune foutue idée de la méthode adéquate pour seulement commencer
mauvaises habitudes accumulées depuis trop longtemps...

Tu te coupes la langue ! la langue, c'est la bite de notre impuissance et la jactance le largué de purée dans le lavabo. Et puis apres, tu essayes de dépendre le moins possible de ce système de merde. Faire ses conserves, c'est mieux que de lire un livre. Etc... Etc...Apprends à voter les pauvres ! c'est bien fait pour leurs sales gueules de kollabos : sur les brocs, tu peux te saper pour 5 ou 10 euros au lieu des 150 demandés en boutique. "Heu...oui, mais j'ai pas le permis !" Passe le, hé con !

Écrit par : le vieux | 22/12/2011

coquille : "apprends à VOLER les pauvres !"...'xcuse, GiPi !

Écrit par : le vieux | 22/12/2011

"la langue, c'est la bite de notre impuissance et la jactance le largué de purée dans le lavabo."

exact
intervenir de façon récurrente sur un support virtuel, encore pire

"Faire ses conserves, c'est mieux que de lire un livre."

c'est marrant je pense exactement le contraire

"Apprends à voler les pauvres"

la manipulation, l'arnaque, la combine, la martingale... ce sont des trucs de manouches et d'africains
c'est moins par considération pour le pauvre connard qui est en face que par orgueil personnel
moins facile de vivre "droit" mais ça évite la souillure

Écrit par : GAG | 22/12/2011

Les commentaires sont fermés.