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31/12/2007

BONNES RESIGNATIONS

2007 aura farouchement pué du cul. Comme 2006, 2005, 2004, 2003, 2002, 2001 et 2000, mais avec quelques innovations dignes de consignation. La prochaine année risque de battre de nouveaux records. Autant s'y préparer en prenant quelques bonnes résignations.

 

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Pour les prochains douze mois, je promets de faire beaucoup d'efforts pour me résoudre à :

 

- accepter comme inévitable et normal l'effacement de toutes ces choses impalpables qui donnaient à notre ex-civilisation sa dignité, sa saveur et sa noblesse ;

 

- ne plus parler politique, sociologie ou philosophie avec les gens dits "normaux", qu'on reconnaît à leur capacité de vivre longtemps sans se poser de questions et à agir cyniquement tout en se croyant fort moraux ;

 

- faire un choix définitif et catégorique entre tentation d'autodestruction méthodique et discipline visant à maximiser les chances de survie, cela ne serait-ce que pour mourir un peu moins ridicule, puisqu'on meurt idiot de toute manière ;

 

- considérer les semi-échecs et la médiocrité constante comme des bases acceptables pour une vie d'adulte responsable, en des temps qui condamnent pareillement les losers flamboyants et les conquérants qui s'assument ;

 

- envisager sereinement l'éventualité préoccupante de faire des mouflets dans un monde sordide et auto-naufrageur, en s'interdisant d'avance de fonder sur eux la moindre espèce d'attente et en ne leur transmettant que la vie, sans aucun flambeau ni étendard ;

 

- continuer à brûler consciencieusement ce que j'ai adoré sans jamais adorer ce que j'ai brûlé.

 

30/12/2007

LA SOCIOLOGIE POUR LES MATHEUX

Moi, pour ce Nouvel An, je me cloître à la baraque avec la coloc', de la viande, du vin rouge et l'intégrale de Type O Negative en boucle. Ca permettra de faire fuir les démons des bons sentiments et de l'ambiance de bastringue obligatoire. Rien que l'idée d'échapper au compte à rebours de minuit moins une suffit à me foutre de bonne.

 

La légende urbaine postule qu'un grand nombre de gens se flinguent pour fêter dignement la fin de l'année officielle. Il semblerait que ça soit faux et que, tous facteurs pris en compte, c'est plutôt au printemps que les morts se mettent à bourgeonner en masse. C'est égal. Faisons honneur à la rumeur traditionnelle. Elle veut que la seule occasion pour les familles émiettées de recoller temporairement leurs lambeaux, pousse ceux qui n'en ont pas même une de substitution à en finir. Ca implique pas mal de sans-baise-fixe, mais pas qu'eux.

 

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Amis célibataires, il y a une raison scientifique à votre solitude acharnée. Ce n'est pas une bonne nouvelle, ça n'améliorera pas votre Veuve Poignet, mais enfin The Truth Shall Set You Free, comme disent les yanquis. D'ailleurs c'est un yanqui qui vous l'explique. Lisez aussi le reste des conneries qu'il publie, c'est toujours ça de temps que n'auront pas vos parasites personnels.

21/12/2007

JOYEUX FOUTOIR

C'est la première année où l'omniprésence de ces sales bonnets rouges à fourrure blanche me saute aussi violemment à la gueule. Ca fait pourtant longtemps que ça existe. Mais cet hiver, c'est devenu un spectacle relativement pénible. Emboîté sur le crâne des vendeuses et des pouffes de pub, "offert" avec toute la panoplie du Père Noël, affiché ça et là tout seul comme s'il s'agissait d'un emblème sacré... Et c'est bien ce qu'il est devenu en fin de compte. Une coiffe traditionnelle. Un truc de Blancs. Quelque chose de typique qu'on vient admirer en touriste, qu'on ramène rigolard à Dubaï pour épater la famille et étaler ses connaissances des cultures lointaines.

 

Je ferais peut-être bien d'en acheter un et de le planquer à la cave. Allez savoir ; il y en a déjà qui estiment qu'un sapin décoré est susceptible d'offenser les non-croyants-non-pratiquants d'un christianisme avec lequel il n'a rien à voir. Alors les bonnets rouges, réminiscence coupable de Saint Nicolas ? Impérialisme Croisé mâtiné de culture yanquie ? Interdisez-moi ça !

 

Une tradition mort-née. Y a qu'en Occident qu'on voit des choses pareilles.

 

Les futurs bondieusards des catacombes se prosterneront devant des icônes qui ressembleront à ça :

 

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"Rien comme la période des fêtes ne me rappelle à quel point je me sens banlieusard de la vie..."

Tyler l'Ancien, 2007

 

*   *   *

... De mon côté, dimanche passé, j'ai passé ma journée à faire des biscuits, notamment des Bruns de Bâle, histoire familiale oblige. Pour une grosse boîte bien pleine à ne partager qu'avec les Unhappy Few de votre entourage, prévoir :

 

- 500 g de sucre

- 500 g d'amandes moulues

- une tombée de cannelle, pour le fun

- 4 c. à soupe de farine très ordinaire

- 4 blancs d'oeufs

- deux plaques de chocolat noir (50%) et une autre à 70%

 

Balancer sucre, amandes, cannelle et farine dans un grand bol. Si vous avez un gros mixer, ça sera plus facile ; on peut rajouter un peu de crème pour facilité l'homogénéité du mélange. Suite de quoi, faire fondre les deux plaques de chocolat 50% au bain marie jusqu'à ce qu'il soit bien liquide et rajouter à l'appareil, s'pas. La dernière plaque, on la débite grossièrement au couteau, ça fera de bien plaisantes pépites - rajouter, touiller. Reste à battre les blancs en neige (celui qui dit "Comme aux manifs contre le CPE" est un mauvais Citoyen) et à mélanger prudemment à la fourchette.

 

3694758e1a483d5daa05f4b912c38141.jpgLa pâte ainsi obtenue sera mise au frigo pendant une bonne heure, pour qu'elle soit plus maniable. Suite de quoi, on l'étalera à 5mm d'épaisseur avant de la découper à l'emporte-pièce. Pour éviter qu'elle colle à la table, préférer le sucre en poudre à la farine, qui dégueulasserait tout. Achtung malgré tout : plus on travaille la pâte longtemps, plus elle colle, et plus on rajoute de sucre, qui lui aussi finira par rendre le tout immangeable. Le tuyau : travailler la pâte en deux parties, dont on gardera la première au frais. Récupérer les chutes du découpage dans un bol et les former en boule au fur et à mesure ; au bout de deux ou trois étalages, on peut la planquer au frigo et recommencer l'opération avec celle qui y patientait déjà. Et ainsi de suite.

 

La tradition, bien plus que la raison, recommande de laisser le tout sécher au moins deux heures avant l'enfournage. Selon la puissance du four, 5 à 7 minutes de cuisson à 220. Certains barbares enduisent la moitié des biscuits avec un mélange de sucre glace et de crème, je crois. Ca gâche tout.

REENCHANTER LE MONDE A COUPS DE VALIUM

Chez les zumanistes, chacun se plaint que le monde est désenchanté, que plus personne ne croit à rien, qu’il n’y a plus d’idéal. Leur désespoir est si déchirant qu'il leur a suffi d'un fugace regain d'intérêt pour le bulletin de vote, chez nos voisins d'ex-France, pour qu'ils entonnent le refrain du "Printemps de la Démocratie". On peut tortiller l'affaire dans tous les sens, une rémission n'est pas vraiment une occasion de sabler le Rimus, et pour choper la trique en pensant à une urne il faut avoir des habitudes sexuelles qui mériteraient des études-genre à elles seules.

 

 

 

Alors bon. Pour une fois, on va être d'accord avec eux. Semble bien que la grisaille ait contaminé bon nombre de nos prétendus semblables. Mais qu’est-ce qu’on nous propose comme enchantement ? La même soupe procédurière habituelle : encore plus de Droits de l’Homme, encore plus de Devoir de Mémoire, encore plus de Tolérance et d’Ouverture sur l’autre. Et surtout, surtout, pas de soumission délibérée à une discipline exigeante, de dépassement de l’aspiration misérable au confort physique et au vide moral.

 

Le désenchantement du monde découle de la mise à mort des épopées, des hymnes, des fresques, des grands élans irrationnels, du sacrifice collectif pour une cause perdue d'avance, de l’acceptation de renoncer à une partie de soi pour que le tout prospère ne serait-ce qu'une lune de plus. Mais nos braves sociologues ont justement HORREUR de tout cela. L’idéal martial, la figure du guerrier, le chef charismatique, la tentation immortelle des solutions violente, la poésie brutale du pronunciamento, toute l’esthétique fascisante en un mot ! Ils vomissent tout cela et ont lutté là-contre depuis plus d’un siècle.

 

C’était compréhensible du temps où ils pouvaient présenter le modèle de l’utopie marxiste comme une alternative crédible. Mais le rêve communiste a pris une sale poussière et s’est vautré dans un peu trop de charniers pour rester présentable. Qu’est-ce qu’il reste, alors ? La branlette New Age alterimmonde, la grande Île aux Enfants où toutes les couleurs et toutes les croyances se fondent dans un imbuvable sirop.

 

 

 

Et encore ! Le fantasme, l’utopie, l’élan inspirateur qu’on est censé y trouver, ça n’apparaît jamais que dans les dépliants publicitaires. Pragmatiquement, ça nous donne quoi ? Des maquignonnages électoraux sordides, des pourcentages d’allocations, des toilettages constitutionnels, des ministères fictifs, des foutaises bureaucratiques, des rafistolages mièvres, du chantage affectif, de la mise en scène tragique d’égratignures dérisoires…. Ça ne donne qu’un vertige de nausée alors que c’est celui de l’ivresse qu’on réclame !

 

 

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Réenchanter son univers personnel, ça suppose de violer les règles en vigueur, de s’en inventer des nouvelles, de scandaliser tout notre entourage raisonnable. Mais que nous offre-t-on, chez les professionnels du rêve démocratique et développement durable ? Toujours plus de lois ! Toujours plus de règles ! Toujours plus de mots interdits, d’idées inacceptables, de débats châtrés par avance, de procès pour manque de délicatesse vis-à-vis des illusions d’autrui ! L’idéologie « Citoyenne » a remplacé l’élémentaire « civisme » (qui emploie encore ce pauvre vieux mot ?) mais ce tour de passe-passe ne nous a pas rendus plus libres.

 

La différence ? Les contraintes ne relèvent plus de l’Etat mais de diverses mafias qui le manipulent à tour de rôle, comme un troupeau de Bernard-l’hermite qui se refileraient la même coquille morte. La peur du flic n’existe plus, parce que des légions de supplétifs se sont enrôlées, pour la plupart gratuitement, certains font même partie de nos prétendus potes et de notre famille biologique. Quand des penseurs et des décideurs osent parler de "police de proximité", ça sent plus que le sapin, ça refoule la morgue passée à la javel. Le flic est votre ami. L'Etat est votre mère de substitution. Les réglements vous protègent contre vous-mêmes.

 

 

 

Ils sont tous là pour nous rappeler l’existence de ces lois non-écrites mais incontournables.

 

Avoir plus de considération pour l’Autre qu’il n’en a pour lui-même.

 

Ne jamais mettre nos origines en avant pour autre chose que les dénigrer.

 

Epurer son vocabulaire de tout ce qui pourrait être mollement réac.

 

Ne rêver qu’à un Monde Plus Juste selon les seuls critères des pourrisseurs de nations.

 

 

 

Pleurnicheries collectives, solennité d’enterrement permanent, monde carcéral à usage unique.

 

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Le réenchantement du monde par le biais de l’idéal Démocrate ? Le rêve Citoyen ? Oubliez. Ca implique au contraire les vieilles croyances saccagées par les républicains, les progressiste et les apatrides. C’est la Légion Etrangère, la Colonisation et les Croisades.  C’est le Front de l’Est, les tranchées de Verdun, la Bérézina. C’est l’obscurantisme franchement assumé. C’est la conquête, la bataille, la discipline martiale, la foi en la communauté du Sang et du Sol. C’est la Révolution barbare et la répression aveugle. C'est un choeur de hurlements où se mêlent Viva la Muerte  et Montjoie. C’est un ensemble de choses non-quantifiables, invendables, irrécupérables, qui ne se plieront à aucun recyclage, même par ceux qui s’en croient les dignes héritiers.

 

 

C’est surtout un refus de la Dignité crispée et bigote qui tient actuellement lieu de Citoyennitude, et l’acceptation rigolarde d’un cadre traditionnel non-négociable, comme le décrit magistralement Raspail. C’est crever avec le sourire pour quelque chose d’impalpable, que les économistes, les éditorialistes et les techniciens  du touillage social ne comprendront jamais. Ils sont à la fois trop déglingués et trop aigris pour ça. Leur haine de la gratuité et de la simplicité volontaire fait match nul contre leur terreur de l’humour noir et du détachement.

 

 

C'est enfin, avant tout, une capacité surhumaine de conserver de la candeur en des temps où une gamine de 13 ans peut facilement tomber sur des photos de sa mère en train de sucer un cheval. Or aucun d'entre nous n'est vraiment à l'abri de cette même déglingue et de cette même aigreur si constitutives de l'Ennemi. Tout au mieux pouvons-nous prétendre à en faire des exutoires de fortune, des accidents de parcours, des solutions de continuité, sans les déguiser avec les mêmes falbalas humanistes que les Boniches de la Zone Grise.

15/12/2007

SURVIVRE ET LAISSER CREVER

On ne peut pas protéger les gens qui ne se protègent pas déjà eux-mêmes la moindre, ou qui n’ont pas au moins la volonté de ne pas crever. Un garde du corps peut souvent être plus gêné dans son boulot par son client que par les menaces extérieures : allez mettre à l’abri quelqu’un qui gesticule face au danger ou qui n’en est absolument pas conscient !


Quand on a appris par soi-même à ne plus digérer les mensonges ou à repousser un adversaire, tout semble relativement simple. Toujours poser des questions précises et ne pas hésiter à balancer des kicks dans les valseuses ou les genoux. Ça ne rend pas invulnérable, ça ne dispense pas d’une vigilance aiguisée et ça n’évite pas toujours de se retrouver la gueule en sang ou les finances en deuil. Reste que ça limite pas mal les dégâts. Alors on se dit qu’il suffit de faire passer les « tuyaux » autour de soi.


Mais lesdits tuyaux ne trouvent souvent pas preneur, parce que la plupart de notre entourage ne croit pas en avoir besoin. La pub ? Oh elle me donne pas envie d’acheter ! La propagande ? Oh j’y suis pas sensible ! Le travail de sape morale et culturelle ? On me la fait pas à moi ! C’est Les Gens qui ont besoin de ça, Les Autres, Les Cons, Les Moutons. Le troupeau, c’est toujours ceux qui nous entourent, même si on y est immergé jusqu’au dernier gramme de laine. Une grand-mère de mes connaissances, qui n’avait plus toute sa tête, se plaignait volontiers de ses séjours forcés en EMS, parce qu’il n’y avait « que des vieux » là-bas…


Effectuer son réveil politique complet est un travail à plein temps qui peut prendre des décennies – et non, on n’est pas réveillé quand on a remplacé les clichés de Monsieur Moyen par ceux d’un classeur à slogans. Alors prétendre éveiller les autres ? Encore faudrait-il qu’ils dorment pour de bon, et qu’ils ne se soient pas plongés délibérément dans un coma artificiel.


Le fait n’est pas seulement qu’un maximum de gens sont crédules, de bonne volonté, optimistes quant aux intentions et aux motivations des pires fils de pute qu’ils rencontrent. S’ajoute à cela un autre fait, beaucoup plus embarrassant : la naïveté toute aussi profonde des prétendus sceptiques.


39e255530bafdc807f0dccedbd44fd96.gifQuelques convictions soutenues par une poignée de stats et de documents ? Voilà qu’on s’intronise alors Grand Infaillible, qu’aucun arnaqueur ne peut jamais atteindre. La vérité, c’est que tout le monde se fait baiser un jour où l’autre, et plutôt régulièrement qu’une seule fois par existence. Pourquoi ? Parce qu’il n’est pas humainement possible d’être en permanence sur le qui-vive pour tous les aspects de notre vie. Il y a toujours des situations, des gens et des domaines qui nous inspirent assez de confiance pour que l’on baisse sa garde. La crédulité n’est pas une défaillance de notre système immunitaire mental : c’est une partie intégrante de notre instinct grégaire. Pas de cohésion sans confiance, et pas de survie hors du groupe.


Le plus endurci des solitaires doit chaque jour s’en remettre à la bonne volonté des gens qu’il fréquente. Il est forcé d’espérer qu’il recevra les services ou produits auxquels le paiement de ses factures lui donne droit. Il est obligé de considérer les gens qu’ils croisent comme a priori pacifiques ou bien intentionnés. Il n’a aucun moyen de savoir si ses prétendus amis sont sincères, si sa femelle simule l’orgasme ou non, si personne n’a craché dans sa bière le temps qu’il aille pisser la précédente.


Se croire critique et bien informé ne met personne à l’abri d’un piège grossier ou d’une maladresse de débutant. La sagesse du combat de rue peut s’appliquer à tous les aspects de notre existence : expérimenté ou pas, un jour tu gagnes, un jour tu perds. Il n’y a pas de magie, ni de technique capable de pallier aux défaillances naturelles de l’homme.


L’instinct tribal peut foutre un atroce complexe christique à celui qui croit son chemin éclairé par ses lumières. Si l’on a plus la tripe libertaire que flicarde – ce qui n’est pas forcément courant dans le milieu, quoiqu’on en dise – on peut renoncer à faire le bonheur des gens à coups de bottes et abandonner toute idée de prosélytisme classique.


C’est une autre histoire que de rester lucide sur ses élans de Rédempteur, de justicier chargé de sauver de l’extinction un peuple qui étale chaque jour sa volonté hallucinée de se dissoudre dans un magma métissé et consumériste, où chaque Citoyen bosse à la commission et se shoote à crédit en attendant son tour de gagner l’Euromillion.


Deux questions douloureuses auxquelles se soumettre chaque matin :


- Est-on à la hauteur de nos prétentions, avant d’expliquer aux autres qu’ils doivent calquer leur vie sur la nôtre ?

- Ces autres méritent-ils vraiment qu’on se casse le cul pour eux ?


Si vous avez un maximum de oui sur trois mois, vous faites partie d’une mafia qui pourrait m’intéresser, ou vous êtes enfermé dans un asile où nous pourrions bien un jour être voisins de chambrée.

 

On en revient à ce même vieux constat d’impuissance et de paralysie qui commence doucement à faire sa place dans les esprits dissidents. Trop tôt ou trop tard pour l’action directe qui nettoie les rues tout en salissant les trottoirs (Qu’un sang impur etc.) Inutile d’attirer l’attention de Monsieur Moyen sur des phénomènes qu’il voit aussi bien que nous, mais sans que ça lui stimule la glande à haine. Vase clos de toute propagande volontariste, écrite et lue par les mêmes cercles minuscules et hermétiques.

 

On peut bien gonfler les pectoraux, invoquer la sacro-sainte « Minorité inaccessible au découragement », se cravacher comme des pénitents – quand on rouvre les yeux, c’est toujours le même cul-de-sac. Et quand résonne l’incontournable « Alors on fait quoi ? », on n’a toujours rien d’autre que la même putain de réponse : « On attend… »

 

On attend. Parce qu’il n’y a absolument rien d’autre à faire. L’Histoire n’a pas besoin de nous en ce moment. Elle nous a mis au chômage technique sans préavis, sans indemnité, et les seules portes que nous ouvre sa lettre de recommandation sont celles de la pharmacie ou de la morgue.

 

Ça n’empêche personne d’attendre utile, en bossant son endurance, en entretenant ses réflexes, en structurant sa pensée et en étoffant son réseau social. Mais pas de conneries : rien de tout ça ne hâtera l’Heure H, si jamais elle sonne quand nous sommes encore chauds. Il n’y aura personne pour donner raison après coup à ceux qui se seront noyés en nageant à contre-courant. La postérité nous a déjà oubliés. Nos contemporains nous vomissent ou nous ignorent.

 

Tout ce qu’il nous reste à perdre, ce sont ces dernières illusions qui nous empêchent de « toucher le fond » de notre colère. Nous ne sauverons personne si nous ne commençons pas par nous sauver nous-mêmes. Nous ne travaillerons pas de manière productive pour l’autonomie de notre peuple si nous ne réalisons pas d’abord notre petite Sécession personnelle. Survivre en évitant la folie et laisser crever quiconque n’appartient pas au premier cercle du clan, voilà un programme à court terme qui semble très adapté aux conditions actuelles.

12/12/2007

SAGESSE POUR GUERRES FUTURES

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<< Il faut toujours tirer sur une ambulance enemie...elle transporte un blessé qui demain sera debout.


Un corbillard, lui, ne transporte que des morts. Là, tu peux laisser passer si ca t'amuse...

...d'autant qu'il faut toujours garder la dernière pour soi... >>

 

Tyler l'Ancien, étalant sa science sur un forum infréquentable, hiver 2007

(reproduit sans son autorisation expresse, qu'il gueule dans les coms s'il en a quoique ce soit à foutre)

11/12/2007

CAUCHEMARS DU MARCHEUR SOLITAIRE

Courses alimentaires. Excellente occasion d'enfiler des vêtements et de sortir à l'air libre. Ça fait un moment que je marche. La ferme n'est plus très loin. Encore quelques centaines de mètres parmi la boue et les cailloux. Les bruits de la route encore proche s'effacent. Il fait un temps dégueulasse.

 

« Dieu fait des images avec les nuages, la pluie fait des miroirs dans la boue »…

 

Des morceaux de plastique sale pendent aux branches d'un arbre à moitié pelé. Comme ces trois ou quatre dernières années, les feuilles ont résisté à l'hiver. La planète qui meurt en se réchauffant sans doute. Il fait d’ailleurs relativement doux. J'ai de la terre plein les frocs jusqu'au-dessus du genou.

 

La mélopée de la pluie et l’odeur discrète du sol détrempé isole l’esprit, on se retrouve face à soi-même. Occasion d’un rapide état des lieux, un bilan du chemin parcouru et des choses qui restent à faire. Je pense aux opportunités manquées jour après jour de changer de vie. Des mois à passer d’un petit boulot à un autre. Interminables semaines creuses, démarches improductives, harcèlement administratif, avenir bouché comme un intestin constipé.

 

Des lignes anonymes hantent ma caboche fébrile dans cet environnement ramené à ses basiques.

 

 

Je fais des rêves. Je suis un vagabond, et je sillonne une France presque vide, avec seulement quelques habitants, resserrés autour de quelques hameaux. Il s’est passé quelque chose, un genre de cataclysme. Je suis soulagé, libéré d’un poids.

 

 Il y a de très grand espace à parcourir. Il n’y a plus de villes, on parle seulement de ruines, lointaines, mais cela inspire le dégoût à tout le monde. La forêt a repoussé, un peu partout. Je sais qu’il y a un peuple de la forêt, maintenant, dont on parle en chuchotant ; il y a autour d’eux beaucoup de mystères. On parle de Dieux terribles, et d’idoles secrètes. Moi, je redresse des cairns, aux carrefours de chemins abandonnés.

 

 

Beauté brute de ces visions. En résonance absolue avec elles. Passer sa vie à marcher en solitaire. Propager la Bonne Parole de la désespérance complète aux gens croisés d’une vallée à l’autre. Un effort physique ininterrompu pour soutenir une purification spirituelle de fond en comble. Ascèse marathonienne. Particulier échangerait vie chiante et avilissante contre existence brève, simple et dure.

 

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Le chemin de Saint-Jacques longe une bonne partie du lac, dit-on. On croise ça et là de minuscules panneaux qui l’indiquent. La seule signalisation qui force le respect. Elle emplit le patriote casanier d’une rage indescriptible de se faire nomade professionnel. Trois décennies passer à flirter avec la folie, les NDE bon marché, et l’obsolescence économique la plus absolue ; ça devrait suffire pour que les trois prochaines soient consacrées exclusivement à faire l’aller-retour entre Appenzell et Compostelle, jusqu’à ce que corps et âme s’accordent pour accepter de se coucher à l’ombre d’un pin et de ne plus bouger.

 

C’est la seule option raisonnable et cohérente. Rejoindre cette minuscule famille des apatrides par dégoût de ce que leur terre est devenue. Faire sa propre Sécession comme un stand-up activist. Emporter avec soi des glands de ce chêne planté par le grand-père et les semer le long de la route, dans l’espoir qu’ils servent un jour à réchauffer une famille moins dégueulasse que les autres, ou à pendre une ordure qui le mérite. De toute sa vie, ne plus toucher un papier à en-tête, un ordinateur ou un téléphone. Devenir ce qu’on ne pensait jamais pouvoir être, pour éviter de ne rien devenir du tout, digéré par les tripes de notre Grand Nulle Part collectif, cette chose qui ose encore s’appeler une Civilisation quand elle se prend un avion sur le coin d’une tour jumelle. 

 

Il y a peu d’amertumes comparables à celle qui te prend quand tu passes à nouveau la porte de ton appart en te disant que ça n’arrivera jamais. Que cent microlâchetés te laisseront patauger à jamais dans la médiocrité desséchante d’un quotidien amorphe. Tu ne verras jamais Compostelle. Tu ne feras que des randos éparses sur les sommets les plus proches. Ton épitaphe parlera d’un type assis dans une gare, intarissable sur l’Orient-Express ou le Transsibérien, mais qui sera né et mort dans la même salle d’attente, la face gluée à la vitre.

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Retour aux factures en retard, au jeu de rôle perpétuel, aux stratégies d’évitement, aux contrats à durée extrêmement déterminée, aux interrogatoires de ceux qui se demandent si on fait exprès ou si on a reçu un sort, et pourquoi on s’échine à leur parler toujours des mêmes choses qui les ennuient ou les foutent mal à l’aise en société.

 

Retour aux casquettes, aux dreadlocks, au bling-bling, aux singeries sous-humaines présentées comme de l’art à la fois raffiné et rentable. Revoilà les cortèges de trahisons unilatérales, de reniement de soi, de déification de l’Autre, de dilution massive comme aboutissement nécessaire du Progrès.

 

Revoilà la pornographie de la marchandise, où on se sert de sa Visa comme Rocco de sa troisième jambe, et où les cadeaux de Noël à moins de cent balles gênent ceux qui ont encore le culot de les offrir. Revoilà les entassements de bipèdes, anxieux d’arriver en retard à des boulots de merde, de devoir attendre quarante-huit heures avant de s’endetter pour un Iphone, de trouver une crèche pour le petit dernier qui n’était pas vraiment prévu au programme.

 

Revoilà la crasse revendiquée, la stupidité assumée, la saloperie de luxe, qui te salissent en retour, qui te renvoient le reflet insoutenable de ta collaboration à l’effondrement général, de ton impuissance d’esclave satisfait à provoquer le moindre remous dans cette vase qui absorbe tes hurlements comme un mur antibruit.

09/12/2007

ALSO SPRACH TYLER DURDEN

Ce que dit Tyler, comme quoi nous sommes la merde et les esclaves de l’histoire, c’est exactement  ce que je ressentais. Je voulais détruire tout ce que je n’aurais jamais de beau. Brûler les forêts amazoniennes. Pomper es chlorofluocarbures droit vers le ciel pour gober tout l’ozone. Ouvrir les vannes des purges des superpétroliers et détacher les têtes des puits de pétrole en haute mer. Je voulais tuer tout le poisson que je ne pouvais me permettre de manger, et détruire sous les marées noires les plages françaises que je ne verrais jamais.

 

 

 

 

Je voulais voir le monde entier toucher le fond.

 

 

 

 

Ce que je voulais en pilonnant ce gamin, c’était en réalité coller une balle entre les deux yeux de tous les pandas qui refusaient de baiser pour sauver leur espèce en danger et de toutes les baleines ou dauphins qui renonçaient et venaient s’échouer sur la terre ferme.

 

 

 

 

Ne pensez pas à cela comme à l’extinction d’une espèce. Prenez cela comme une remise en place, toutes proportions retrouvées.

 

 

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Des milliers d’années durant, les êtres humains avaient baisé, déversé leurs ordures et leur merde sur cette planète, et aujourd’hui, l’histoire attendait de moi que je nettoie après le passage de tout le monde. Il faut que je lave et que je raplatisse mes boîtes de soupe. Et que je justifie chaque goutte d’huile moteur usagée.

 

 

 

 

Et il faut que je règle la note pour les déchets nucléaires et les réservoirs à essence enterrés et les boues toxiques étalées sur les champs d’épandage d’ordures une génération avant ma naissance. (...)

 

 

 

 

Je voulais respirer la fumée.

 

Les oiseaux et les biches sont un luxe stupide et tous les poissons devraient flotter.

 

Je voulais brûler le Louvre. Je me ferai les marbres Elgin à la masse et je m’essuierai le cul avec La Joconde. C ’est mon monde maintenant.

 

C’est mon monde, ici, mon monde, et tous ces gens anciens sont morts.

 

 

 

Chuck Palahniuk, Fight Club, Folio, p. 177

02/12/2007

LA REVOLUTION EN LACOSTE

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La plupart du temps, on peut se contenter de lire les articles de l'Organe et se dispenser de parcourir les commentaires, généralement élaborés sur la base de "Z'êtes des couilles molles". Et puis parfois la Rédac, qui semble répondre scrupuleusement mêmes aux écritures automatiques les plus insanes, se fend d'une précision qui vaut son pesant de cachoux. L'article en question donne du scalpel à la gonzo dans les pauvres tripes d'ex-France et conclut à sa mort cérébrale. Un premier lecteur entonne une énième version des Damnés de la Terre, mélopée increvable qui colle aux basques de tous les anars dès qu'un déserteur des Troupes Coloniales enflamme une poubelle. Solidarité avec les pocketbikers illettrés qui meurent sans casque ! Et autres développements sur le Grand Soir initié par les Bons Sauvages en rogne. La réplique du comité de rédaction ne clôt pas la discussion proprement dire, puisqu'on n'empêche jamais personne de bavarder quand il n'y a plus rien à dire, d'où les dizaines de réactions qui suivent pour engraisser le schmilblick. Mais il n'y a pourtant rien à rajouter à ça :

 

Le rêve du Caillera Moyen c'est une BM, une pute, et une paire de baskets.

Encore plus pire que le rêve du Français Moyen.

Faut arrêter de rêver à la révolution avec ces arriérés mentaux même pas foutus de foutre le feu à la Tour TF1.
 

La révolution se fera sans eux, et contre eux. Ils finiront comme les asociaux sous Staline: au désert!

De toundra ou de glace.