29/01/2008
ANAAL NATHRAKH - "HELL IS EMPTY AND ALL THE DEVILS ARE HERE"
Pour qui Excalibur est un affreux navet guère plus évolué que Conan le Barbare, aucune raison de jeter une oreille même circonspecte à un groupe baptisé d’une citation archiconnue du Merlin guignolesque de John Boorman. On se dit que ça doit causer de casque à cornes ou de talismans, et qu’on a déjà assez donné de fric à Manowar quand on était damoiseau à poils longs.
Alors on classe l’affaire et comme on ne sait pas ce qu’on loupe, on ne souffre pas. Jusqu’au jour où, par un mélange de charité païenne et d’ennui insomniaque, on daigne laisser sa chance à Hell is empty, dont le titre est emprunté à la Tempête de Shakespear. Une demi-heure plus tard, on n’est pas loin de se flageller pour s’être arrêté à l’étiquette d’une gnôle aussi décapante.
Du grindcore irréprochablement construit, exécuté avec la rigueur d’un instructeur des Marines et qui sait conserver des rythmiques audibles autant que des mélodies accrocheuses ? Oui mon Général, ça existe ! Ça existe même depuis 1999 et de toute évidence, ça s’est foutrement bonifié avec les années, à l’instar de ces précieux nectars d’abbaye dont les lies accumulent de la patate dans leur bouteille. La cuvée 2007 offre un cru à déguster strictement entre amateurs éclairés, après avoir planqué tous les briquets qui traînent pour prévenir des pulsions irrépressibles de foutre le feu au quartier.
C’est qu’une tempête de flammes et de fumées toxiques serait un accompagnement nécessaire à une telle bande-son pour guerre civile. Dès l’intro d’une courte minute, on sent déjà qu’on va se farcir du costaud. Le son est ample, la cadence pesante comme une forteresse volante, deux notes criardes zigzaguent en guêpes folles au-dessus de cette masse qui s’avance. Puis sans la plus élémentaire sommation, c’est l’assaut qui est donné. Der Holle rache kocht in meinem herzen sonne une charge hystérique, où se mélangent déchirements d’œsophage et chœurs guerriers.
Le véritable exploit de ce skeud est de tout casser et de pousser la démence sonique et vocale à leur paroxysme tout en restant déchiffrable. La netteté des compositions, la précision ahurissante des partitions et la production cristalline offrent un écrin inespéré à un tel distillat de haine 100% pure. C’est à se demander comment on peut encore se concentrer sur un instrument quand on est pris d’une telle fureur d’anéantissement, comment on peut avoir encore le moindre égard pour l’auditeur tout en promettant l’extermination à tous les bipèdes du globe.
Si le niveau de brutalité ne baisse jamais d’un micropoil, chacun des titres repousse les limites du désordre organisé sans jamais déchoir dans le bordel inaudible auquel un Brutal Truth s’était trop souvent livré dans son ultime galette. Dans la névrose mitraillante de Virus Bomb ou de Sanction Extremis, on ne perd jamais le fil.
Le dénommé « Irrumator », assumant la charge délirante de toute l’instrumentation, fait preuve d’une maîtrise dans l’ingénierie du boucan qui fera date dans l’histoire. Quant à son comparse « V.I.T.R.I.O.L. », il passe des bruits purement animaux à des élans lyriques qui soulignent le massacre ambiant par un effet de contraste tout à fait scotchant.
Death, hardcore, grind, noise, chant clair et vibrant comme un appel aux armes, tous les registres du suicide vocal y passent sur fond d’ode à l’homicide planétaire conçu comme une forme d’art supérieure à toutes les autres. Rarement une citation biblique aura pu foutre hérétiques et fous de Dieu dans la même fosse commune : ce septième Lama Sabachthani, hurlement du Christ face au Père qui l’abandonne, c’est la révolte de l’enfant devenu homme par le viol originel de l’horreur, celle dont Céline disait qu’on pouvait rester puceau si longtemps.
Oui, en vérité, il n’y a plus personne en enfer en ce moment. Mais maintenant que nous avons ces trente minutes d’aliénation contrôlée, nous savons déjà que nous ne serons pas dépaysés quand viendra notre tour d’y faire notre place.
12:00 Publié dans Survie musicale zonarde | Lien permanent | Commentaires (2)
23/01/2008
CRISE, REVOLUTION ET AUTRES QUESTIONS SANS IMPORTANCE
« Quand les caddies seront vides... » : introduction à tous les grands délires sur la fureur du peuple qui se rebellera un jour, parce qu’il en aura assez, parce qu’il aura faim, parce qu’il n’aura plus le choix que de se conformer aux grandes attentes que nous plaçons sur lui.
Or ces grandes attentes, Monsieur Peuple, il s’en tape. Il s’est toujours tapé des rêves des gens qui ont fondé des religions sur lui (et qui ont souvent fini par le massacrer pour qu’il se conforme au culte). Fafs, écolos, anars et bolchos, tous ont en commun une vision idéalisée de leurs semblables et de leur potentiel de changement. Tous ignorent un fait fondamental, c’est que l’individu préfère toujours être mal accompagné que seul, et que les foules vivront mieux sous une dictature maternante que face à une liberté anxiogène. C’est vexant mais c’est ainsi. Le knout, c’est le sex-toy des foules depuis la préhistoire.
Ce n’est même pas quelque chose de condamnable en soi. Sans un minimum de stabilité, de sécurité et de prudence, il n’y a tout simplement pas de famille, pas de projets à long terme. Pas de science, pas d’art, pas d’autonomie, rien de ce qui donne de la saveur à l’existence, rien de ce qui équilibre les sacrifices atroces qu’exige une vie en communauté. Les hyperactifs que nous sommes tous un peu ont tendance à l’oublier, à cultiver le risque gratuit, à parer leur suicide émotionnel d’atours flamboyants.
Ceci dit, on peut poser que l’homme moderne n’a jamais été aussi assisté et déresponsabilisé que depuis un demi-siècle. Jamais ses tâches n’ont été aussi prémâchées, ses envies surgavées avant même qu’elles n’apparaissent. Il vit le long d’une crémaillère dont le pire des accidents ne peut le faire dérailler. Et on voudrait que ce mammifère dévirilisé ait conservé en lui la rage de se battre pour sa survie, alors qu’il accepte fort gentiment la perspective d’avoir une descendance qui lui crache à la gueule ?
Il ne faut pas attendre, ni espérer, que l’aggravation des conditions de vie accouche la conscience politique de nos semblables. Bien au contraire, plus Monsieur Moyen devra se battre pour bouffer, moins il aura à foutre de contribuer à toute espèce de planification du bien-être collectif. Il ne s’embarrassera plus de mythes incapacitants façon Fraternité Universelle et apport culturel formidable des allogènes, mais il ne se lancera pas non plus dans aucune sorte de Reconquête. La seule épopée qu’il aura les moyens de concevoir et de mener, c’est la lutte quotidienne pour que sa famille ait à bouffer et un endroit pour s’abriter du froid et des prédateurs.
Les grandes crises historiques développent les formidables capacités d’adaptation et d’inventivité de l’homme. Elles ne sont pas des catalyseurs à ses envies de révolution, qui n’existent que dans l’esprit d’une stricte minorité de timbrés.
Le révolutionnaire moyen cherche à briser le carcan de la frustration d’action gigantesque, il rêve de justice expéditive, d’élimination des ennemis, d’une marge de manœuvre lui permettant d’assouvir ses instincts haineux et ses phobies les plus profondes. Mais il n’est pas un bâtisseur, qui lui ne peut œuvrer que dans le calme, la réflexion et le long terme. Les civilisations se fondent et s’effondrent sans cette mouche du coche.
S’il nous reste une Révolution à accomplir, elle ne consistera pas à transformer la société ou à faire naître l’homme nouveau. Tout au contraire : il s’agira de ne pas laisser la société nous transformer et effacer l’homme tel qu’il a été de la sédentarisation à la Première Guerre mondiale. Il ne s’agit plus de renverser l’ordre établi mais de nous en extraire. Et c’est en cela que notre pire ennemi vit dans notre tête – pas à la Maison Blanche , ni dans une madrasa, une Loge ou une succursale de la Licra. Symptômes et épiphénomènes, tout cela. Questions d’un autre temps, enjeux d’un autre match. Il a été disputé, et perdu, par nos grands-parents, à dix contre un. Tout le terrain est occupé par l’équipe adverse et ses innombrables mercenaires.
Notre match à nous n’aura rien à voir. Nous n’avons plus rien à prévenir, plus rien à conserver. Il nous reste les souvenirs glorieux de choses que nous n’avons pas vécues et un confort matériel qui se paiera de plus en plus cher. C’est trop peu pour donner le moindre sens à notre existence. Et il faudra du temps et beaucoup de désillusions vachardes pour accepter cette idée toute simple : les plus grandes conquêtes que nous pouvons espérer seront des choses très ingrates, terre-à-terre, sans panache.
Ni l’effondrement de tout l’édifice social, ni la Guerre-Civile -Ethnique, ni le Califat des Racailles ne sont des scénarii dignes d’une seconde d’attention. Par contre un certain émiettement du pouvoir est imaginable, à l’image de l’Europe de l’an mille. Un savoir antique confiné à une élite bien protégée. Une léopardisation du territoire, avec des enclaves fonctionnant selon les règles des groupes humains majoritaires. Le tout avec le maintien d’une fiction de gouvernance officielle, de paix incontestable faute d’armées organisées, de « confiance des consommateurs » aussi endettés que leurs Représentants Démocratiques…
Tous les inconvénients de la déglingue sans ses compensations en matière d’autonomie, en somme. Les amateurs de science-fiction n’ont qu’à étudier de près le Queens ou les townships de Johannesburg. Les autorités en charge de ces petits coins de paradis ne risquent ni leur peau, ni leur mandat, ni leurs revenus, ni même leur réputation. Le jour où les métropoles d’Europe connaîtront ce degré d’incohérence et d’insécurité, il ne se passera – …rien. Business as usual. Les amateurs peuvent continuer à comptabiliser les zincivilités et le nombre d'ambulances caillassées par week-end si ça leur fait se sentir utiles. La charité chrétienne voudrait qu'on leur recommande d'essayer au moins de rentabiliser ce hobby en cherchant du taff dans un quotidien gratuit, plutôt que d'inonder les fora droitards à leurs propres frais. Pour la différence que ça ferait, ça leur paierait au moins quelques sixpacks...
Oh bien sûr, il y aura quelques dizaines, quelques centaines de purs et durs peut-être, qui tenteront d’aller jusqu’au bout. Sortir des villes. Rejoindre les coins de campagne échappant encore à l’urbanisation et au dépeuplement complet. Effacer leur passé, leur identité officielle, leurs liens avec la Machine , quitte à mettre en scène leur mort pour être tranquilles. Réapprendre le braconnage et l’agriculture de subsistance, apprivoiser la faim et la peur animale. Une vie incroyablement courte, épuisante et intense. Va savoir si, ça et là, des communautés n’arriveront pas à se constituer et à maintenir une sorte d’autarcie minimale.
Et puis il y aura tous les autres. Ceux qui auront eu leur Epiphanie trop tard et trop seuls pour pouvoir entreprendre quoique ce soit de productif. Ceux qui seront déjà coincé par une famille, un job juste assez payé et gratifiant, des accoutumances tolérées par la morale de la Croissance , la lâcheté ordinaire face au risque de souffrir, le poids d’une âme méticuleusement tordue et viciée dès la naissance. Je me range d’entrée dans cette catégorie, au cas où on irait croire que je pontifie. Pour nous autres, Citoyens sans importance de la Grisaille technocrate, l’espoir d’une victoire sur nous-mêmes est le plus mince.
Mais si nous ne devions viser qu’une mort paisible, en accord avec nous-mêmes et droit dans nos rangeos, est-ce qu’on a vraiment le choix ?
01:28 Publié dans La Zone Grise | Lien permanent | Commentaires (21)
16/01/2008
LE VIOL DES ANCÊTRES
Un documentaire l'autre soir sur la TSR, le plus grand sanctuaire celte peut-être, découvert dans une carrière à la frontière est du canton de Vaud. Une certaine trique à penser qu'on vit depuis toujours dans l'épicentre d'un monde disparu. Théories fascinantes, images hypnotisantes - et douloureuses une fois de plus. La carrière "prend du retard", les archéologues doivent "sauver ce qu'ils peuvent", tout sera bientôt bousillé. Un immense cimetierre réduit en miettes pour construire des clapiers pour citoyens-consommacteurs. Ca rappelle ces ruines gallo-romaines (?) découvertes au centre de Lausanne, brièvement étudiées avant d'être elles aussi bétonnées. S'élève sur elles à présent un nouveau parking étriqué, rutilant et bien entendu racketteur.
On peut chercher pendant des lustres des explications socioéconomiques au pourrissement de notre civilisation. La faute aux allogènes, à la racaille insécuritaire, aux néoliberticides, à tout ce que vous voudrez. Quand je vois ce genre de choses, je me dis qu'il y a des raisons bien plus simples à chercher du côté de la métaphysique. Ricanement des sociologues et des militants de la plupart des chapelles connues. M'en fous : on peut affirmer qu'un groupe humain qui traite ainsi ses ancêtres ne mérite que de finir comme nous.
Nous parquons les "vieux" dans des crevoirs médicalisés, où la maltraitance et l'indignité sont moins que banales. Pouvoirs publics, société civile et congrégations s'inclinent dans une même courbette devant les marchands si ceux-ci décident que vendre du caillou vaut mieux pour tout le monde que de préserver des sanctuaires. Nos cimetierres eux-mêmes ne permettent plus aux morts de reposer en paix puisqu'on ne les laisse y pourrir qu'une poignée d'années avant de tout foutre dehors en vrac pour faire de la place aux suivants - votre dernière demeure ne sera qu'une gare de triage, une chambre froide camouflée en salle d'attente.
Tout ça rappelle ces histoires brumeuses d'égyptologues crevés on ne sait comment, quelques temps après avoir violé les tombes des rois oubliés du Nîl. On se rappelle que des centaines de momies ont été exposées à la corrosion de l'air libre, dépouillées de leur richesses, quand on ne les réduisait pas carrément en poudre pour des usages thérapeutiques abjects.
Quand un Orc croit nous insulter en nous conseillant d'aller baiser nos morts, il ne fait que décrire posément une réalité avalisée par l'ensemble du corps social.
Les Dieux, la sagesse, les anciens et les morts, éléments d'une même nébuleuse spirituelle à la base de toutes les croyances originelles de la foutue planète. Comme si c'était pour rien, un hasard, une stupide incidence. Nous connaissons tous ce vieux dicton, selon lequel les dieux rendent fous ceux qu'ils veulent perdre. Passez la tête par la fenêtre la plus proche, jetez un oeil aux environs, vous verrez que c'est parfaitement plausible.
Les hétéros se comportent en lopette et les pédales promènent leur "Fierté" dans des bastringues sponsorisées par les autorités. Les mères de famille déguisent leurs filles en pute, sous le regard passif et bovin de Papa, pour autant qu'il ne soit pas parti "vivre sa sexualité" dans une autre ville. Les hommes les plus puissants de la planète sont tous plus ou moins toxicos. La disparition d'espèces de moustiques nuisibles est pleurée comme un crime et le remplacement de l'Européen de souche par un masse bâtarde célébrée comme un "progrès inévitable". Nous bouffons de la merde en boîte lyophilisée et farcie de produits chimiques, que les publicitaires nous vendent en mettant en scène un artisanat culinaire antique fantasmé.
Des scientifiques sérieux et expérimentés investissent les médias pour nous dire de consommer bio et de nous déplacer en trotinettes sous peine de faire mourir Gaïa dans moins d'un siècle. Vendre son cul aux usuriers dès 16 ans, et pour ne s'offrir qu'un écran plat ou un Iphone, est non seulement accepté mais encore promu à chaque coupure pub, sur des affiches recouvrant les murs de nos villes. Les surfaces encore non-occupées sont barbouillées d'inscriptions illisibles par des primates chargés de quincaillerie luxueuse, emballés dans des fringues de marque informes.
Un Bon Citoyen est un individu qui admire ouvertement ce que cent générations avant lui considéraient comme hideux, imbécile ou gerbatoire. Il est licite, voire encouragé, d'avoir "honte de son pays", particulièrement quand une partie de sa population refuse de se laisser joyeusement enfiler par les traîtres et les apatrides.
Encore une fois, nous sommes loin, très très loin d'avoir touché le fond. Mais pour qui a la tripe un tant soit peu mystique, difficile de ne pas voir dans ce cumul d'absurdités et de grotesqueries un symptôme clair d'une folie furieuse à l'échelle continentale. Une démence parfaitement méritée à l'époque de l'Enfant-Roi, du travailleur jetable et des anciens euthanasiables du moment qu'ils coûtent plus qu'ils ne rapportent. Le savoir et l'accepter ne rend pas notre sort plus facile à avaler, parce que nous allons couler avec les masses en qui tout nous révulse. Mais on se dit que, quelque part, il y a une sorte de justice immanente et que cette déliquescence générale n'est que la monnaie de notre fausse pièce.
13:45 Publié dans La Zone Grise | Lien permanent | Commentaires (15)
15/01/2008
" DEJA UN PEU MORT "
<< Bertignac, Bruni, Sarkozy, et le bourgeois « socialiste ». Aucun intrus, les amis. Tout un monde, très cohérent. Laid, inculte, simpliste, lénifiant. >> C'est pas charitable de se moquer des socialistes, mais on va se resservir quand même.
Post-blogum : Si vous avez pris le temps de flâner chez le camarade Nikita, qui ne doit guère aimer les Bras-Armés-du-Capitalisme-Patriarchal que nous sommes très clairement, vous aurez remarqué que sa prose goûtue lui a amené des commentaires peu amènes. Il s'est même vu, ou cru, dans l'obligation de publier une mise au point juste après, histoire d'expliquer à certains scatocéphales que non, il ne souhaitait pas la mort de mademoiselle Bruni. Ni celle des mâles qui achètent son album pour autre chose que d'hypothétiques photos à poil dans la pochette.
C'est quand même attristant. Je veux dire, pour lui. D'être lu par des blaireaux. Déjà qu'il y avait des incivils comme yours truly qui lui faisaient de la pub... De mon côté je peux pas (encore) me plaindre. A ce jour, n'ont commenté mes insanités que des gens majoritairement très aimables.
Voilà bien l'un des rares - sinon l'unique - privilège d'être un gros faf bas du front. Quand on écrit des horreurs ou des conneries, personne ne s'en formalise ni ne s'en offusque, soit parce que personne ne nous lit, soit parce que ça fait partie de notre cahier des charges officiel.
02:20 Publié dans De quoi j'me merde ? | Lien permanent | Commentaires (3)
11/01/2008
REACS MASTURB'
Monsieur Tang, plaisant plumitif relativement inclassable, raille gentiment les réacs, leur demandant si ce monde moderne qu'ils vomissent ne leur est pas indispensable. Plus punk-faf que réac (mais après tout on ne choisit pas les étiquettes que nous collent les gens), je réponds à leur place, sans me lancer dans des arguties sur ce qu'est la réacosphère et comment on en obtient l'AOC. Ca bataille pas mal à ce sujet dans les commentaires de son texte, d'ailleurs.
Le fond de la critique de Tang, c'est que le réac jouit de son dégoût. Il serait un mastubateur de la gerbe, accro à ce qu'il dénonce, trouvant dans la haine qui le dévore une volupté qu'il aurait honte d'avouer, pour peu qu'il en soit seulement conscient.
La critique a sa cohérence. L'aboutissement de la haine est la mort, celle de l'ennemi si on peut le détruire, la nôtre s'il est indestructible. A quoi bon s'acharner ici-bas si tout nous y est intolérable ? Ca tombe sous le sens. Le réactionnaire qui accumule les années de service et dont la rage ne décline pas devrait donc forcément trouver son compte dans le cloaque.
Il y en a sans doute qui fonctionnent sur ce shéma-là. Je ne parle pas en leur nom. Je ne parle au nom de personne, d'ailleurs. Le pluriel des "Enfants" de ce pauvre blogue, c'est surtout une coquetterie dérisoire, une manière de sonner un peu moins autiste et égocentrique. Voici néanmoins comment je vois les choses, pour autant que ça intrigue qui que ce soit.
Plus qu'un branleur clandestin, le réac est au contraire un "impuissant." Il ne tient pas particulièrement à sa vie ni à ce monde, mais il a l'instinct de survie chevillé à l'âme. Il voit bien que notre civilisation n'est plus qu'un immense tas de chiasse, mais l'idée de civilisation en soi lui paraît malgré tout belle et noble. Il hait ce que nous sommes devenus mais n'arrive pas à oublier ce que nous pensons avoir été.
Ce n'est pas par sensualité masochiste qu'il se maintient en vie et qu'il continue à ouvrir son claque-merde. Il faudrait pour cela qu'il ait sincèrement l'impression de tirer son épingle du jeu, de propager une Bonne Parole à des Happy Few dignes d'estime et de confiance. Il faudrait en outre qu'il ait, en son for intérieur, la conviction que tout ne va pas si mal que cela, ou que la situation finira un jour par basculer à force de persévérance.
Or tel n'est pas le cas, à tous les niveaux :
° rien ne nous permet de croire à notre indépendance, à notre unicité. La nausée continue qui nous hante tête et tripes ne fait pas de nous des gens spéciaux. Elle ne nous protège d'aucune des crasses qui affligent nos contemporains. Nous pataugeons exactement dans la même vase purulente que le premier tektonikeur venu. Avec ou sans lubrifiant, sous GHB ou à jeun, coincé par la honte ou par des menottes, c'est la même enculade pour tout le monde, et nous pareil. Aucune perspective économique sérieuse, familles désunies, harcèlement pornographique, petits mensonges tactiques, addictions plus ou moins avouables, absence de structures de vie alternatives, isolement social, émiettement de la foi militante, renoncement à reculons... Notre statut d'Affreux Officiels ne nous protège de que dalle. Seul et pitoyable soulagement, nous répéter que nous sommes un peu plus conscient du viol que le reste du cheptel. A cela aucune jouissance, tout au plus une goutte de baume à l'esprit.
° le public de cette microscopique contre-culture n'existe virtuellement pas. Nous ne sommes peut-être qu'une vingtaine d'enragés comateux, qui se copient les uns les autres, chacun adaptant à sa petite sauce les mêmes rancoeurs que son voisin de Favoris. Nous ne savons pas trop à qui nous causons, quel effet notre prose lui fait, quel usage il peut bien en tirer concrètement. Un coup d'oeil à l'isolement social et médiatique des patriotes d'Europe suffit à clarifier la perspective : c'est à peine si nous perturbons les gradins du cirque soc-dem. Quand les eurotraîtres prétendent s'en prendre à notre discours, ce sont les instances démocratiques très officielles qu'ils visent. Boneheads, ethnocentristes, révisos ou spécialistes du complot sioniste, tout ce beau linge ne fait vraiment peur à personne, ni à ceux qui les dénoncent ni à Monsieur Moyen. Par contre, les capitalistes pur jus que sont Le Pen, Haider, Blocher, Bush ou Berlusconi terrorisent les Bien-Pensants. On ne leur impute notre aura que pour contrer leur projets, qui sont bien loin de nos préoccupations. Dépouillés de ce parfum rebelle, que nous reste-t-il ? Quelques routines de tribu urbaine morcelée.
° enfin, le réac lucide devine très bien que tout ne va pas encore si mal que ça. Le réac suicidairement clairvoyant devine même que nous sommes loin d'avoir touché le fond de la cuvette de l'Histoire. Nous vivons une chute qui n'aura jamais de fin, parce qu'il n'y a pas de limites à l'obscénité et à la décadence. Le réac moyen, en revanche, croit qu'un jour viendra où son peuple aura atteint un seuil critique d'humiliation et de colère, qui le poussera soit à prendre les armes, soit à ne pas s'opposer à ce que nous les prenions pour lui. Définir ce stade ? Il en est incapable. Il imagine tout au plus une dhimmitude officielle, une dictature talibane et multiculti bordélique, rien de précis. Mais il ne se résoud pas vraiment à ce cauchemar ; il l'utilise comme un point d'appui pour sa colère et sa détermination, sans envisager une seconde qu'une telle situation puisse durer éternellement. Il y a pourtant pire que cet aveuglement-là : il y a le refus de considérer qu'il est déjà trop tard depuis longtemps.
Nos vies sont dirigées par les impératifs des vendeurs de malbouffe, des bourreurs de crânes publicitaires, des brasseurs de peuple et des illuminés mondialistes. Cinéma, télévision, radio et ouaibe nous gavent en permanence de laideur, de stupidité, de soumission volontaire aux usuriers, de glorification de la came et du putanat. L'eau courante des grandes villes a un goût de détergent, le pain ne se conserve pas douze heures, et chaque jour des millions de tonnes de nourriture intacte sont détruites plutôt que d'être vendues moins cher. Durant des décennies, des herbivores ont reçu des cadavres moulus en poudre comme nourriture. La mort de la paysannerie continentale a été planifiée puis minutieusement mise en oeuvre. Des vieillards sont parqués dans des crevoirs collectifs par leur famille, qui dans le même mouvement droguent leurs enfants pour qu'ils soient plus dociles à l'école. La haine du leucoderme est véhiculée par tout un pan de la culture hip-hop, qui génère depuis dix ans les plus gros bénéfices de l'industrie du disque. Le dégoût de soi et la vénération de l'Autre sont promues quotidiennement comme des manifestations éclatantes de sagesse et de courage.
Rien de tout cela n'a, à ce jour, déclenché la moindre folie meurtrière en Occident. Monsieur Moyen accepte, cautionne, participe, en redemande, pense à autre chose, ne pense à rien, prend des pilules pour ne plus penser qu'à son boulot et son crédit.
Et il y en a encore pour se demander sincèrement "Jusqu'où va-t-on descendre " ? La réponse est que nous ne nous arrêterons jamais. Nous avons déjà franchi le point de non-retour. Tout ce qui aurait provoqué des émeutes sanguinaires chez nos arrière-grands-parents est devenu banal. Et pour celui se sent des envies de planter des clous dans une batte de base-ball, il n'y a aucun espoir de faire payer cet effondrement continental aux responsables et à leurs successeurs. Il ne peut que hurler son horreur à s'en déchirer la gorge, hurler en attendant la folie ou la mort. Il ne le fait pas en croyant être utile. Il le fait parce qu'il n'a pas vraiment le choix. Il le fait pour ne pas tuer stupidement un inconnu qui n'y peut rien, ou pour éviter de faire du mal à ce qu'il lui reste de famille.
Là non plus, monsieur Tang, il n'y a pas de quoi se pougner la plume à pamphlet. Ecrire jour après jour ce genre de constat, ça n'a rien de gratifiant, ni même de vraiment soulageant. C'est Sysiphe crevant chaque soir l'abcès qui se sera à nouveau infecté le lendemain. C'est vider une fosse à purin avec une paille. Le tout dans le silence assourdissant et l'indifférence bovine de ceux qui se prétendent nos semblables.
J'exagère comme un ado sous amphètes ? J'en fait des tonnes pour que dalle ? Je fais mon putain d'intéressant en poussant la caricature à coups de truelle ? Possible. Qu'est-ce que j'en sais finalement ? Peut-être que mes ventilations sont tordantes, pas crédibles pour un sou, symptômes négligeables d'une mauvaise qualité de sommeil et d'un déclassement social bénin.
Peut-être que tout ça vous fait doucement marrer. Je préférerais, à la limite. Ca donnerait le sentiment fugace d'avoir été utile pendant un instant.
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06/01/2008
OUI, ON PEUT DIRE TOUT CA A PARTIR D'UNE PUB POUR DU PARFUM...
Un marchand de pantalons cherche à nous vendre du parfum ; pour ce faire, il fait tourner diverses réclames dans la boîte-à-cons, selon qu’il drague les clients féminins ou masculins. Leitmotiv en forme de question : are you alive ? Et ma foi c’est une bonne question. C’est même une putain d’excellente foutue question.
L’argument sous-jacent dudit marchand, c’est que vous ne vivez pas complètement si, de temps en temps, vous ne jouez pas à la salope ou au hooligan. C’est ce que laisse entendre respectivement la pub version ovaires (où une pouffe se rhabille tranquillement dans un ascenseur) et la pub version couilles (montrant un bobo chevelu et hilare, fuyant on ne sait quelle émeute). Message final : pour sentir comme une vraie pornslut ou un intermittent de la révolution A.O.C., trempez-vous la viande dans la fragrance en question. Mieux encore : un coup de vaporisateur, et vous aurez le courage de les imiter brièvement.
La radasse et le racaillon altermerdeux vantés comme idéal de dépassement de soi. C’est ça ou continuer à vivre une vie de blaireau.
Un slogan vendeur qui est aussi un constat de base. En majorité, nous ne sommes pas vraiment vivants. Nous entretenons des vies végétatives, où le summum de transgression consiste à asticoter la police ou à se déguiser en pute d’un soir. Rien de neuf sous le smog : c’est la même vieille récupe des idéaux de 68 histoire de meubler le quotidien de ses anciens acteurs.
Jouissez sans entraves pour un euro la minute en tarif local. Exigez l’impossible grâce à nos mensualités à la carte. Prix cassés sur tous les kits de guérillero au rayon chiffons.
On connaît, d’accord, n’empêche que ça résume bien la situation.
La demoiselle de l’ascenseur a un petit air de sainte-nitouche, monsieur l’émeutier est très propre sur lui. Tous deux ne se sont permis qu’un petit écart de conduite avant de reprendre le chemin du bureau. On est assez loin du cow-boy Marlboro. C’est du rock’n’roll précuit, à consommer vite fait, un coup de folie chronométré, sécurisé, garanti de ne pas nous éloigner trop longtemps des impératifs de l’entreprise et des mœurs de la moyenne bourgeoisie. Les frasques qu’on peut se permettre quand on vit dans un loft ou qu’on conduit une Lexus. Même l’exubérance ne se prête qu’aux riches.
Le reste du bétail, nous autres salariés jetables ou Bachelors en Recherche Permanente de Sous-job, tout ça n’est pas vraiment pour nous. Pas de misérabilisme excessif dans cette affirmation. On doit pouvoir se payer ce sent-bon sans trop rougir le compte en banque. C’est plutôt cette rébellion propre et dandyesque qui est hors de notre portée. Quand trouver ou conserver un taff acceptable devient un privilège tacite, travailler plus pour bastringuer plus est moins un cri de guerre électoral qu’un fantasme compliqué. Ce qu’il nous reste, c’est l’acceptation forcée d’un quotidien couleur béton et saveur coton. Un ennui à la fois douillet et asphyxiant. Ce n’est pas du parfum qui va nous en extirper.
Ce qui est horrible avec l’ennui, c’est que tout, autour de nous, concourt à nous en rendre seuls responsables. C’est ton problème si tu te fais chier ; ce ne sont pas les distractions, les emmerdes ou les échéances impératives qui manquent, à toi la faute si tu parviens malgré tout à ne pas t’amuser autant que le reste de la foule. C’est évidemment l’un des plus gros foutages de gueule de l’histoire, et le mensonge le plus largement gobé de tous les temps.
Ne servir à rien ni personne et vivre un siècle. Mener une existence de réserve d’organe vivante, de stocks de plasma sanguin organisés en famille et en zones urbaines plus ou moins sensibles. Etre scotché jour et nuit sur Second Life doit même avoir plus de goût que ça. Mais le goût, n’est-ce pas, c’est sans doute un truc pour bourgeois de droite. L’important c’est la vie tout court. Chose life. Reprenez la longue tirade introductive de Trainspotting, elle fait le tour de la question et on n’a pas dit ça mieux depuis. On peut toutefois y rajouter de nouveaux éléments, histoire d’être bien à la page.
Choisissez la vie sûre et stable, sans risques qui ne soit couvert par une assurance. Choisissez les ronds-points, les passages piétons sécurisés tous les vingt mètres, les bacs à fleurs monolithiques qui perturbent les lignes droites, les radars plantés en champ de blé et les retraits de permis pour avoir toussé au volant.
Choisissez la vie désinfectée, neutralisée, désodorisée, climatisée, hospitalisée. Choisissez de dire non au tabac, de dire oui à un seul verre avant la route, de dire peut-être à moins de trois bière puisqu’au-dessus c’est du binge drinking. Choisissez les soins anti-cernes, anti-âge, anti-temps, anti-oxygène tant qu’on y est puisque cette saloperie finit par ronger les chairs qui en ont besoin.
Choisissez la Voie du Milieu, moralement de gauche, économiquement de droite, culturellement de partout et philosophiquement de nulle part. Choisissez d’investir chez Max Gras-de-Lard, d’agir en consomm’acteur, de faire durer le Développement, d’éteindre la lumière en vous brossant les dents, de ne pas tirer la chasse avant que la cuvette ne déborde.
Plus que de l’uniformité, l’ennui renaît perpétuellement de l’inutilité. Et, navré d’insister graveleusement là-dessus, mais nos vies actuelles ne servent absolument à rien. Maintenir l’érection des flux de cash et de marchandise ne donne pas de sens à l’existence humaine. Obéir à une Constitution Citoyenne ne fait rien pour la fortifier. Brasser des hectolitres d’air à chaque carnaval électoral ne la rend que plus triste. Tout faire pour vivre le plus longtemps possible sans vieillir lui retire toute dignité. Remplacer toute idole par une humanité couleur arc-en-ciel la souille de ridicule. Mais tout ça n’a pas d’importance pour nos éleveurs et nos cornacs.
Dans notre batterie, le temps se divise entre loisirs à crédit, sommeil artificiel et ponte intensive. L’accepter, c’est faire preuve tout à la fois de civisme, de réalisme, d’un sens élevé de ses responsabilités et de solidité au niveau des reins. Benzodiazépines all-you-can-eat pour ceux à qui ça laisse comme une acidité dans la gorge. Quarantaine discrète pour les réfractaires au bonheur en gélules ; tôt ou tard, la folie, l’addiction ou l’effondrement moral ramèneront dans le circuit les rescapés du suicide à la petite semaine.
Prenez cent détours ou coupez tout droit, c’est pareil : nous sommes tous condamnés à protéger nos viandes des bactéries et du vieillissement, tout en pourrissant activement nos esprits et nos instincts avec des toxiques plus délirants que les bricolages cosmothéologiques du Mandarom. Haine de Soi, Culte du Corps Parfait, charcuteries esthétiques et hygiénisme collectif qui transforme notre environnement en sas de décontamination mondial.
Face à cette partouze de tous les cauchemars imaginables, même le fantasme réac du Califat d’Occident en survêts Lacoste a une tournure quasi érotique.
06:15 Publié dans Chez les boniches de la Zone Grise | Lien permanent | Commentaires (6)
05/01/2008
LA SUISSE, PAYS MECHANT
Depuis le temps que la gôche et la supergôche nous répètent que la Suisse est un pays waciste, dont la politique est directement piquée aux nazis, et sans leur payer de royalties en plus !
Les droitards murmuraient prudemment, au fond des carnotzets, que c'était quand même un chouïa exagéré. Les superdroitards, s'égosillant aux buffets de gare, criaient à la propagande masochiste tout en rêvant que ça soit la simple réalité. Bref, c'était le foutoir et l'incertitude. Au royaume des comptes secrets et du macadam quotidiennement briqué, la honte !
Voilà enfin une confirmation cinglante apportée par la Confédération elle-même, sous prétexte de lutter contre le piratage et l'économie souterraine :
19:10 | Lien permanent | Commentaires (1)
02/01/2008
KACZYNSKILL THEM ALL
Oui, c'est à chier comme jeu de mots. Passons, voulez-vous ? J'ai pas trop d'inspiration cet après-midi.
On peut trouver facilement le texte intégral de La Société industrielle et son avenir à divers endroits du ouaibe, en anglais comme en français, dans des traductions très acceptables. J'en avais filé le lien dans un post il y a quelques semaines. Il est à présent disponible dans la nouvelle rubrique L'Evangile de Sainte Colère, sur votre gauche. Ce pour deux raisons.
La première, c'est que ce travail remarquable n'est vraiment pas assez lu par les patriotes d'Europe. En dix ans d'activisme en Romandie et en France voisine, je n'ai jamais vu ce bouquin cité par qui que ce soit. De récentes conversations avec de jeunes sympathisants ont confirmé cette grave lacune. Les grosses têtes de notre non-mouvement auront beau jeu de le disqualifier pour son style rudimentaire, son argumentation sommaire, ses répétitions, ses approximations historiques. Les ultras et les monomaniaques n'y trouveront pas leur compte, puisque que l'auteur n'y parle ni de substitution démographique ni du Quatrième Reich Nazislamiste d'Eurabia. Vu que je ne m'adresse ni aux uns ni aux autres, question réglée.
La seconde, c'est qu'on a beau filer des liens aux gens, ils cliquent dessus, jettent un oeil distrait, foutent l'URL dans leurs favoris s'ils ont vraiment mauvaise conscience, et n'y reviennent jamais plus. S'ajoute à cela le fait qu'une routine très solide peut facilement s'instaurer dans notre usage du ouaibe : visite régulière du même petit cercle de sites, avec de rares incursions chez ceux qui ne pensent pas exactement comme nous. Jusqu'ici, Kaczynski semble n'avoir intéressé que les post-situs ou l'ultragauche, parages où le dissident natio ne nage pas si souvent qu'il aime à le faire croire. Alors évidemment, présenter d'énièmes versions de ses textes, même mises en page et directement imprimables, ça fait plutôt double emploi. Et puis il serait préférable qu'on les trouve sur le réseau identitaire mainstream, qui brasse un lectorat autrement plus considérable que celui qui scrute mes pauvres vomissures. Qu'importe. Comme ça, eux au moins n'auront plus d'excuses valable pour ne pas lire Mister Unabomber.
15:15 | Lien permanent | Commentaires (3)
31/12/2007
BONNES RESIGNATIONS
2007 aura farouchement pué du cul. Comme 2006, 2005, 2004, 2003, 2002, 2001 et 2000, mais avec quelques innovations dignes de consignation. La prochaine année risque de battre de nouveaux records. Autant s'y préparer en prenant quelques bonnes résignations.
Pour les prochains douze mois, je promets de faire beaucoup d'efforts pour me résoudre à :
- accepter comme inévitable et normal l'effacement de toutes ces choses impalpables qui donnaient à notre ex-civilisation sa dignité, sa saveur et sa noblesse ;
- ne plus parler politique, sociologie ou philosophie avec les gens dits "normaux", qu'on reconnaît à leur capacité de vivre longtemps sans se poser de questions et à agir cyniquement tout en se croyant fort moraux ;
- faire un choix définitif et catégorique entre tentation d'autodestruction méthodique et discipline visant à maximiser les chances de survie, cela ne serait-ce que pour mourir un peu moins ridicule, puisqu'on meurt idiot de toute manière ;
- considérer les semi-échecs et la médiocrité constante comme des bases acceptables pour une vie d'adulte responsable, en des temps qui condamnent pareillement les losers flamboyants et les conquérants qui s'assument ;
- envisager sereinement l'éventualité préoccupante de faire des mouflets dans un monde sordide et auto-naufrageur, en s'interdisant d'avance de fonder sur eux la moindre espèce d'attente et en ne leur transmettant que la vie, sans aucun flambeau ni étendard ;
- continuer à brûler consciencieusement ce que j'ai adoré sans jamais adorer ce que j'ai brûlé.
02:40 Publié dans Marées Noires | Lien permanent | Commentaires (1)
30/12/2007
LA SOCIOLOGIE POUR LES MATHEUX
Moi, pour ce Nouvel An, je me cloître à la baraque avec la coloc', de la viande, du vin rouge et l'intégrale de Type O Negative en boucle. Ca permettra de faire fuir les démons des bons sentiments et de l'ambiance de bastringue obligatoire. Rien que l'idée d'échapper au compte à rebours de minuit moins une suffit à me foutre de bonne.
La légende urbaine postule qu'un grand nombre de gens se flinguent pour fêter dignement la fin de l'année officielle. Il semblerait que ça soit faux et que, tous facteurs pris en compte, c'est plutôt au printemps que les morts se mettent à bourgeonner en masse. C'est égal. Faisons honneur à la rumeur traditionnelle. Elle veut que la seule occasion pour les familles émiettées de recoller temporairement leurs lambeaux, pousse ceux qui n'en ont pas même une de substitution à en finir. Ca implique pas mal de sans-baise-fixe, mais pas qu'eux.
Amis célibataires, il y a une raison scientifique à votre solitude acharnée. Ce n'est pas une bonne nouvelle, ça n'améliorera pas votre Veuve Poignet, mais enfin The Truth Shall Set You Free, comme disent les yanquis. D'ailleurs c'est un yanqui qui vous l'explique. Lisez aussi le reste des conneries qu'il publie, c'est toujours ça de temps que n'auront pas vos parasites personnels.
17:24 Publié dans La Zone Grise | Lien permanent | Commentaires (0)
21/12/2007
JOYEUX FOUTOIR
C'est la première année où l'omniprésence de ces sales bonnets rouges à fourrure blanche me saute aussi violemment à la gueule. Ca fait pourtant longtemps que ça existe. Mais cet hiver, c'est devenu un spectacle relativement pénible. Emboîté sur le crâne des vendeuses et des pouffes de pub, "offert" avec toute la panoplie du Père Noël, affiché ça et là tout seul comme s'il s'agissait d'un emblème sacré... Et c'est bien ce qu'il est devenu en fin de compte. Une coiffe traditionnelle. Un truc de Blancs. Quelque chose de typique qu'on vient admirer en touriste, qu'on ramène rigolard à Dubaï pour épater la famille et étaler ses connaissances des cultures lointaines.
Je ferais peut-être bien d'en acheter un et de le planquer à la cave. Allez savoir ; il y en a déjà qui estiment qu'un sapin décoré est susceptible d'offenser les non-croyants-non-pratiquants d'un christianisme avec lequel il n'a rien à voir. Alors les bonnets rouges, réminiscence coupable de Saint Nicolas ? Impérialisme Croisé mâtiné de culture yanquie ? Interdisez-moi ça !
Une tradition mort-née. Y a qu'en Occident qu'on voit des choses pareilles.
Les futurs bondieusards des catacombes se prosterneront devant des icônes qui ressembleront à ça :
"Rien comme la période des fêtes ne me rappelle à quel point je me sens banlieusard de la vie..."
Tyler l'Ancien, 2007
* * *
... De mon côté, dimanche passé, j'ai passé ma journée à faire des biscuits, notamment des Bruns de Bâle, histoire familiale oblige. Pour une grosse boîte bien pleine à ne partager qu'avec les Unhappy Few de votre entourage, prévoir :
- 500 g de sucre
- 500 g d'amandes moulues
- une tombée de cannelle, pour le fun
- 4 c. à soupe de farine très ordinaire
- 4 blancs d'oeufs
- deux plaques de chocolat noir (50%) et une autre à 70%
Balancer sucre, amandes, cannelle et farine dans un grand bol. Si vous avez un gros mixer, ça sera plus facile ; on peut rajouter un peu de crème pour facilité l'homogénéité du mélange. Suite de quoi, faire fondre les deux plaques de chocolat 50% au bain marie jusqu'à ce qu'il soit bien liquide et rajouter à l'appareil, s'pas. La dernière plaque, on la débite grossièrement au couteau, ça fera de bien plaisantes pépites - rajouter, touiller. Reste à battre les blancs en neige (celui qui dit "Comme aux manifs contre le CPE" est un mauvais Citoyen) et à mélanger prudemment à la fourchette.
La pâte ainsi obtenue sera mise au frigo pendant une bonne heure, pour qu'elle soit plus maniable. Suite de quoi, on l'étalera à 5mm d'épaisseur avant de la découper à l'emporte-pièce. Pour éviter qu'elle colle à la table, préférer le sucre en poudre à la farine, qui dégueulasserait tout. Achtung malgré tout : plus on travaille la pâte longtemps, plus elle colle, et plus on rajoute de sucre, qui lui aussi finira par rendre le tout immangeable. Le tuyau : travailler la pâte en deux parties, dont on gardera la première au frais. Récupérer les chutes du découpage dans un bol et les former en boule au fur et à mesure ; au bout de deux ou trois étalages, on peut la planquer au frigo et recommencer l'opération avec celle qui y patientait déjà. Et ainsi de suite.
La tradition, bien plus que la raison, recommande de laisser le tout sécher au moins deux heures avant l'enfournage. Selon la puissance du four, 5 à 7 minutes de cuisson à 220. Certains barbares enduisent la moitié des biscuits avec un mélange de sucre glace et de crème, je crois. Ca gâche tout.
11:23 Publié dans La Zone Grise | Lien permanent | Commentaires (4)
REENCHANTER LE MONDE A COUPS DE VALIUM
Chez les zumanistes, chacun se plaint que le monde est désenchanté, que plus personne ne croit à rien, qu’il n’y a plus d’idéal. Leur désespoir est si déchirant qu'il leur a suffi d'un fugace regain d'intérêt pour le bulletin de vote, chez nos voisins d'ex-France, pour qu'ils entonnent le refrain du "Printemps de la Démocratie". On peut tortiller l'affaire dans tous les sens, une rémission n'est pas vraiment une occasion de sabler le Rimus, et pour choper la trique en pensant à une urne il faut avoir des habitudes sexuelles qui mériteraient des études-genre à elles seules.
Alors bon. Pour une fois, on va être d'accord avec eux. Semble bien que la grisaille ait contaminé bon nombre de nos prétendus semblables. Mais qu’est-ce qu’on nous propose comme enchantement ? La même soupe procédurière habituelle : encore plus de Droits de l’Homme, encore plus de Devoir de Mémoire, encore plus de Tolérance et d’Ouverture sur l’autre. Et surtout, surtout, pas de soumission délibérée à une discipline exigeante, de dépassement de l’aspiration misérable au confort physique et au vide moral.
Le désenchantement du monde découle de la mise à mort des épopées, des hymnes, des fresques, des grands élans irrationnels, du sacrifice collectif pour une cause perdue d'avance, de l’acceptation de renoncer à une partie de soi pour que le tout prospère ne serait-ce qu'une lune de plus. Mais nos braves sociologues ont justement HORREUR de tout cela. L’idéal martial, la figure du guerrier, le chef charismatique, la tentation immortelle des solutions violente, la poésie brutale du pronunciamento, toute l’esthétique fascisante en un mot ! Ils vomissent tout cela et ont lutté là-contre depuis plus d’un siècle.
C’était compréhensible du temps où ils pouvaient présenter le modèle de l’utopie marxiste comme une alternative crédible. Mais le rêve communiste a pris une sale poussière et s’est vautré dans un peu trop de charniers pour rester présentable. Qu’est-ce qu’il reste, alors ? La branlette New Age alterimmonde, la grande Île aux Enfants où toutes les couleurs et toutes les croyances se fondent dans un imbuvable sirop.
Et encore ! Le fantasme, l’utopie, l’élan inspirateur qu’on est censé y trouver, ça n’apparaît jamais que dans les dépliants publicitaires. Pragmatiquement, ça nous donne quoi ? Des maquignonnages électoraux sordides, des pourcentages d’allocations, des toilettages constitutionnels, des ministères fictifs, des foutaises bureaucratiques, des rafistolages mièvres, du chantage affectif, de la mise en scène tragique d’égratignures dérisoires…. Ça ne donne qu’un vertige de nausée alors que c’est celui de l’ivresse qu’on réclame !
Réenchanter son univers personnel, ça suppose de violer les règles en vigueur, de s’en inventer des nouvelles, de scandaliser tout notre entourage raisonnable. Mais que nous offre-t-on, chez les professionnels du rêve démocratique et développement durable ? Toujours plus de lois ! Toujours plus de règles ! Toujours plus de mots interdits, d’idées inacceptables, de débats châtrés par avance, de procès pour manque de délicatesse vis-à-vis des illusions d’autrui ! L’idéologie « Citoyenne » a remplacé l’élémentaire « civisme » (qui emploie encore ce pauvre vieux mot ?) mais ce tour de passe-passe ne nous a pas rendus plus libres.
La différence ? Les contraintes ne relèvent plus de l’Etat mais de diverses mafias qui le manipulent à tour de rôle, comme un troupeau de Bernard-l’hermite qui se refileraient la même coquille morte. La peur du flic n’existe plus, parce que des légions de supplétifs se sont enrôlées, pour la plupart gratuitement, certains font même partie de nos prétendus potes et de notre famille biologique. Quand des penseurs et des décideurs osent parler de "police de proximité", ça sent plus que le sapin, ça refoule la morgue passée à la javel. Le flic est votre ami. L'Etat est votre mère de substitution. Les réglements vous protègent contre vous-mêmes.
Ils sont tous là pour nous rappeler l’existence de ces lois non-écrites mais incontournables.
Avoir plus de considération pour l’Autre qu’il n’en a pour lui-même.
Ne jamais mettre nos origines en avant pour autre chose que les dénigrer.
Epurer son vocabulaire de tout ce qui pourrait être mollement réac.
Ne rêver qu’à un Monde Plus Juste selon les seuls critères des pourrisseurs de nations.
Pleurnicheries collectives, solennité d’enterrement permanent, monde carcéral à usage unique.
Le réenchantement du monde par le biais de l’idéal Démocrate ? Le rêve Citoyen ? Oubliez. Ca implique au contraire les vieilles croyances saccagées par les républicains, les progressiste et les apatrides. C’est la Légion Etrangère, la Colonisation et les Croisades. C’est le Front de l’Est, les tranchées de Verdun, la Bérézina. C’est l’obscurantisme franchement assumé. C’est la conquête, la bataille, la discipline martiale, la foi en la communauté du Sang et du Sol. C’est la Révolution barbare et la répression aveugle. C'est un choeur de hurlements où se mêlent Viva la Muerte et Montjoie. C’est un ensemble de choses non-quantifiables, invendables, irrécupérables, qui ne se plieront à aucun recyclage, même par ceux qui s’en croient les dignes héritiers.
C’est surtout un refus de la Dignité crispée et bigote qui tient actuellement lieu de Citoyennitude, et l’acceptation rigolarde d’un cadre traditionnel non-négociable, comme le décrit magistralement Raspail. C’est crever avec le sourire pour quelque chose d’impalpable, que les économistes, les éditorialistes et les techniciens du touillage social ne comprendront jamais. Ils sont à la fois trop déglingués et trop aigris pour ça. Leur haine de la gratuité et de la simplicité volontaire fait match nul contre leur terreur de l’humour noir et du détachement.
C'est enfin, avant tout, une capacité surhumaine de conserver de la candeur en des temps où une gamine de 13 ans peut facilement tomber sur des photos de sa mère en train de sucer un cheval. Or aucun d'entre nous n'est vraiment à l'abri de cette même déglingue et de cette même aigreur si constitutives de l'Ennemi. Tout au mieux pouvons-nous prétendre à en faire des exutoires de fortune, des accidents de parcours, des solutions de continuité, sans les déguiser avec les mêmes falbalas humanistes que les Boniches de la Zone Grise.
09:20 Publié dans La Zone Grise | Lien permanent | Commentaires (0)
15/12/2007
SURVIVRE ET LAISSER CREVER
On ne peut pas protéger les gens qui ne se protègent pas déjà eux-mêmes la moindre, ou qui n’ont pas au moins la volonté de ne pas crever. Un garde du corps peut souvent être plus gêné dans son boulot par son client que par les menaces extérieures : allez mettre à l’abri quelqu’un qui gesticule face au danger ou qui n’en est absolument pas conscient !
Quand on a appris par soi-même à ne plus digérer les mensonges ou à repousser un adversaire, tout semble relativement simple. Toujours poser des questions précises et ne pas hésiter à balancer des kicks dans les valseuses ou les genoux. Ça ne rend pas invulnérable, ça ne dispense pas d’une vigilance aiguisée et ça n’évite pas toujours de se retrouver la gueule en sang ou les finances en deuil. Reste que ça limite pas mal les dégâts. Alors on se dit qu’il suffit de faire passer les « tuyaux » autour de soi.
Mais lesdits tuyaux ne trouvent souvent pas preneur, parce que la plupart de notre entourage ne croit pas en avoir besoin. La pub ? Oh elle me donne pas envie d’acheter ! La propagande ? Oh j’y suis pas sensible ! Le travail de sape morale et culturelle ? On me la fait pas à moi ! C’est Les Gens qui ont besoin de ça, Les Autres, Les Cons, Les Moutons. Le troupeau, c’est toujours ceux qui nous entourent, même si on y est immergé jusqu’au dernier gramme de laine. Une grand-mère de mes connaissances, qui n’avait plus toute sa tête, se plaignait volontiers de ses séjours forcés en EMS, parce qu’il n’y avait « que des vieux » là-bas…
Effectuer son réveil politique complet est un travail à plein temps qui peut prendre des décennies – et non, on n’est pas réveillé quand on a remplacé les clichés de Monsieur Moyen par ceux d’un classeur à slogans. Alors prétendre éveiller les autres ? Encore faudrait-il qu’ils dorment pour de bon, et qu’ils ne se soient pas plongés délibérément dans un coma artificiel.
Le fait n’est pas seulement qu’un maximum de gens sont crédules, de bonne volonté, optimistes quant aux intentions et aux motivations des pires fils de pute qu’ils rencontrent. S’ajoute à cela un autre fait, beaucoup plus embarrassant : la naïveté toute aussi profonde des prétendus sceptiques.
Quelques convictions soutenues par une poignée de stats et de documents ? Voilà qu’on s’intronise alors Grand Infaillible, qu’aucun arnaqueur ne peut jamais atteindre. La vérité, c’est que tout le monde se fait baiser un jour où l’autre, et plutôt régulièrement qu’une seule fois par existence. Pourquoi ? Parce qu’il n’est pas humainement possible d’être en permanence sur le qui-vive pour tous les aspects de notre vie. Il y a toujours des situations, des gens et des domaines qui nous inspirent assez de confiance pour que l’on baisse sa garde. La crédulité n’est pas une défaillance de notre système immunitaire mental : c’est une partie intégrante de notre instinct grégaire. Pas de cohésion sans confiance, et pas de survie hors du groupe.
Le plus endurci des solitaires doit chaque jour s’en remettre à la bonne volonté des gens qu’il fréquente. Il est forcé d’espérer qu’il recevra les services ou produits auxquels le paiement de ses factures lui donne droit. Il est obligé de considérer les gens qu’ils croisent comme a priori pacifiques ou bien intentionnés. Il n’a aucun moyen de savoir si ses prétendus amis sont sincères, si sa femelle simule l’orgasme ou non, si personne n’a craché dans sa bière le temps qu’il aille pisser la précédente.
Se croire critique et bien informé ne met personne à l’abri d’un piège grossier ou d’une maladresse de débutant. La sagesse du combat de rue peut s’appliquer à tous les aspects de notre existence : expérimenté ou pas, un jour tu gagnes, un jour tu perds. Il n’y a pas de magie, ni de technique capable de pallier aux défaillances naturelles de l’homme.
L’instinct tribal peut foutre un atroce complexe christique à celui qui croit son chemin éclairé par ses lumières. Si l’on a plus la tripe libertaire que flicarde – ce qui n’est pas forcément courant dans le milieu, quoiqu’on en dise – on peut renoncer à faire le bonheur des gens à coups de bottes et abandonner toute idée de prosélytisme classique.
C’est une autre histoire que de rester lucide sur ses élans de Rédempteur, de justicier chargé de sauver de l’extinction un peuple qui étale chaque jour sa volonté hallucinée de se dissoudre dans un magma métissé et consumériste, où chaque Citoyen bosse à la commission et se shoote à crédit en attendant son tour de gagner l’Euromillion.
Deux questions douloureuses auxquelles se soumettre chaque matin :
- Est-on à la hauteur de nos prétentions, avant d’expliquer aux autres qu’ils doivent calquer leur vie sur la nôtre ?
- Ces autres méritent-ils vraiment qu’on se casse le cul pour eux ?
Si vous avez un maximum de oui sur trois mois, vous faites partie d’une mafia qui pourrait m’intéresser, ou vous êtes enfermé dans un asile où nous pourrions bien un jour être voisins de chambrée.
On en revient à ce même vieux constat d’impuissance et de paralysie qui commence doucement à faire sa place dans les esprits dissidents. Trop tôt ou trop tard pour l’action directe qui nettoie les rues tout en salissant les trottoirs (Qu’un sang impur etc.) Inutile d’attirer l’attention de Monsieur Moyen sur des phénomènes qu’il voit aussi bien que nous, mais sans que ça lui stimule la glande à haine. Vase clos de toute propagande volontariste, écrite et lue par les mêmes cercles minuscules et hermétiques.
On peut bien gonfler les pectoraux, invoquer la sacro-sainte « Minorité inaccessible au découragement », se cravacher comme des pénitents – quand on rouvre les yeux, c’est toujours le même cul-de-sac. Et quand résonne l’incontournable « Alors on fait quoi ? », on n’a toujours rien d’autre que la même putain de réponse : « On attend… »
On attend. Parce qu’il n’y a absolument rien d’autre à faire. L’Histoire n’a pas besoin de nous en ce moment. Elle nous a mis au chômage technique sans préavis, sans indemnité, et les seules portes que nous ouvre sa lettre de recommandation sont celles de la pharmacie ou de la morgue.
Ça n’empêche personne d’attendre utile, en bossant son endurance, en entretenant ses réflexes, en structurant sa pensée et en étoffant son réseau social. Mais pas de conneries : rien de tout ça ne hâtera l’Heure H, si jamais elle sonne quand nous sommes encore chauds. Il n’y aura personne pour donner raison après coup à ceux qui se seront noyés en nageant à contre-courant. La postérité nous a déjà oubliés. Nos contemporains nous vomissent ou nous ignorent.
Tout ce qu’il nous reste à perdre, ce sont ces dernières illusions qui nous empêchent de « toucher le fond » de notre colère. Nous ne sauverons personne si nous ne commençons pas par nous sauver nous-mêmes. Nous ne travaillerons pas de manière productive pour l’autonomie de notre peuple si nous ne réalisons pas d’abord notre petite Sécession personnelle. Survivre en évitant la folie et laisser crever quiconque n’appartient pas au premier cercle du clan, voilà un programme à court terme qui semble très adapté aux conditions actuelles.
02:14 Publié dans Autopsie de la Dissidence | Lien permanent | Commentaires (11)
12/12/2007
SAGESSE POUR GUERRES FUTURES
<< Il faut toujours tirer sur une ambulance enemie...elle transporte un blessé qui demain sera debout.
Un corbillard, lui, ne transporte que des morts. Là, tu peux laisser passer si ca t'amuse...
...d'autant qu'il faut toujours garder la dernière pour soi... >>
Tyler l'Ancien, étalant sa science sur un forum infréquentable, hiver 2007
(reproduit sans son autorisation expresse, qu'il gueule dans les coms s'il en a quoique ce soit à foutre)
21:27 | Lien permanent | Commentaires (5)
11/12/2007
CAUCHEMARS DU MARCHEUR SOLITAIRE
Courses alimentaires. Excellente occasion d'enfiler des vêtements et de sortir à l'air libre. Ça fait un moment que je marche. La ferme n'est plus très loin. Encore quelques centaines de mètres parmi la boue et les cailloux. Les bruits de la route encore proche s'effacent. Il fait un temps dégueulasse.
« Dieu fait des images avec les nuages, la pluie fait des miroirs dans la boue »…
Des morceaux de plastique sale pendent aux branches d'un arbre à moitié pelé. Comme ces trois ou quatre dernières années, les feuilles ont résisté à l'hiver. La planète qui meurt en se réchauffant sans doute. Il fait d’ailleurs relativement doux. J'ai de la terre plein les frocs jusqu'au-dessus du genou.
La mélopée de la pluie et l’odeur discrète du sol détrempé isole l’esprit, on se retrouve face à soi-même. Occasion d’un rapide état des lieux, un bilan du chemin parcouru et des choses qui restent à faire. Je pense aux opportunités manquées jour après jour de changer de vie. Des mois à passer d’un petit boulot à un autre. Interminables semaines creuses, démarches improductives, harcèlement administratif, avenir bouché comme un intestin constipé.
Des lignes anonymes hantent ma caboche fébrile dans cet environnement ramené à ses basiques.
Je fais des rêves. Je suis un vagabond, et je sillonne une France presque vide, avec seulement quelques habitants, resserrés autour de quelques hameaux. Il s’est passé quelque chose, un genre de cataclysme. Je suis soulagé, libéré d’un poids.
Il y a de très grand espace à parcourir. Il n’y a plus de villes, on parle seulement de ruines, lointaines, mais cela inspire le dégoût à tout le monde. La forêt a repoussé, un peu partout. Je sais qu’il y a un peuple de la forêt, maintenant, dont on parle en chuchotant ; il y a autour d’eux beaucoup de mystères. On parle de Dieux terribles, et d’idoles secrètes. Moi, je redresse des cairns, aux carrefours de chemins abandonnés.
Beauté brute de ces visions. En résonance absolue avec elles. Passer sa vie à marcher en solitaire. Propager la Bonne Parole de la désespérance complète aux gens croisés d’une vallée à l’autre. Un effort physique ininterrompu pour soutenir une purification spirituelle de fond en comble. Ascèse marathonienne. Particulier échangerait vie chiante et avilissante contre existence brève, simple et dure.
Le chemin de Saint-Jacques longe une bonne partie du lac, dit-on. On croise ça et là de minuscules panneaux qui l’indiquent. La seule signalisation qui force le respect. Elle emplit le patriote casanier d’une rage indescriptible de se faire nomade professionnel. Trois décennies passer à flirter avec la folie, les NDE bon marché, et l’obsolescence économique la plus absolue ; ça devrait suffire pour que les trois prochaines soient consacrées exclusivement à faire l’aller-retour entre Appenzell et Compostelle, jusqu’à ce que corps et âme s’accordent pour accepter de se coucher à l’ombre d’un pin et de ne plus bouger.
C’est la seule option raisonnable et cohérente. Rejoindre cette minuscule famille des apatrides par dégoût de ce que leur terre est devenue. Faire sa propre Sécession comme un stand-up activist. Emporter avec soi des glands de ce chêne planté par le grand-père et les semer le long de la route, dans l’espoir qu’ils servent un jour à réchauffer une famille moins dégueulasse que les autres, ou à pendre une ordure qui le mérite. De toute sa vie, ne plus toucher un papier à en-tête, un ordinateur ou un téléphone. Devenir ce qu’on ne pensait jamais pouvoir être, pour éviter de ne rien devenir du tout, digéré par les tripes de notre Grand Nulle Part collectif, cette chose qui ose encore s’appeler une Civilisation quand elle se prend un avion sur le coin d’une tour jumelle.
Il y a peu d’amertumes comparables à celle qui te prend quand tu passes à nouveau la porte de ton appart en te disant que ça n’arrivera jamais. Que cent microlâchetés te laisseront patauger à jamais dans la médiocrité desséchante d’un quotidien amorphe. Tu ne verras jamais Compostelle. Tu ne feras que des randos éparses sur les sommets les plus proches. Ton épitaphe parlera d’un type assis dans une gare, intarissable sur l’Orient-Express ou le Transsibérien, mais qui sera né et mort dans la même salle d’attente, la face gluée à la vitre.
Retour aux factures en retard, au jeu de rôle perpétuel, aux stratégies d’évitement, aux contrats à durée extrêmement déterminée, aux interrogatoires de ceux qui se demandent si on fait exprès ou si on a reçu un sort, et pourquoi on s’échine à leur parler toujours des mêmes choses qui les ennuient ou les foutent mal à l’aise en société.
Retour aux casquettes, aux dreadlocks, au bling-bling, aux singeries sous-humaines présentées comme de l’art à la fois raffiné et rentable. Revoilà les cortèges de trahisons unilatérales, de reniement de soi, de déification de l’Autre, de dilution massive comme aboutissement nécessaire du Progrès.
Revoilà la pornographie de la marchandise, où on se sert de sa Visa comme Rocco de sa troisième jambe, et où les cadeaux de Noël à moins de cent balles gênent ceux qui ont encore le culot de les offrir. Revoilà les entassements de bipèdes, anxieux d’arriver en retard à des boulots de merde, de devoir attendre quarante-huit heures avant de s’endetter pour un Iphone, de trouver une crèche pour le petit dernier qui n’était pas vraiment prévu au programme.
Revoilà la crasse revendiquée, la stupidité assumée, la saloperie de luxe, qui te salissent en retour, qui te renvoient le reflet insoutenable de ta collaboration à l’effondrement général, de ton impuissance d’esclave satisfait à provoquer le moindre remous dans cette vase qui absorbe tes hurlements comme un mur antibruit.
14:45 Publié dans Marées Noires | Lien permanent | Commentaires (3)
09/12/2007
ALSO SPRACH TYLER DURDEN
Ce que dit Tyler, comme quoi nous sommes la merde et les esclaves de l’histoire, c’est exactement ce que je ressentais. Je voulais détruire tout ce que je n’aurais jamais de beau. Brûler les forêts amazoniennes. Pomper es chlorofluocarbures droit vers le ciel pour gober tout l’ozone. Ouvrir les vannes des purges des superpétroliers et détacher les têtes des puits de pétrole en haute mer. Je voulais tuer tout le poisson que je ne pouvais me permettre de manger, et détruire sous les marées noires les plages françaises que je ne verrais jamais.
Je voulais voir le monde entier toucher le fond.
Ce que je voulais en pilonnant ce gamin, c’était en réalité coller une balle entre les deux yeux de tous les pandas qui refusaient de baiser pour sauver leur espèce en danger et de toutes les baleines ou dauphins qui renonçaient et venaient s’échouer sur la terre ferme.
Ne pensez pas à cela comme à l’extinction d’une espèce. Prenez cela comme une remise en place, toutes proportions retrouvées.
Des milliers d’années durant, les êtres humains avaient baisé, déversé leurs ordures et leur merde sur cette planète, et aujourd’hui, l’histoire attendait de moi que je nettoie après le passage de tout le monde. Il faut que je lave et que je raplatisse mes boîtes de soupe. Et que je justifie chaque goutte d’huile moteur usagée.
Et il faut que je règle la note pour les déchets nucléaires et les réservoirs à essence enterrés et les boues toxiques étalées sur les champs d’épandage d’ordures une génération avant ma naissance. (...)
Je voulais respirer la fumée.
Les oiseaux et les biches sont un luxe stupide et tous les poissons devraient flotter.
Je voulais brûler le Louvre. Je me ferai les marbres Elgin à la masse et je m’essuierai le cul avec La Joconde. C ’est mon monde maintenant.
C’est mon monde, ici, mon monde, et tous ces gens anciens sont morts.
Chuck Palahniuk, Fight Club, Folio, p. 177
18:05 Publié dans Marées Noires | Lien permanent | Commentaires (6)
02/12/2007
LA REVOLUTION EN LACOSTE
La plupart du temps, on peut se contenter de lire les articles de l'Organe et se dispenser de parcourir les commentaires, généralement élaborés sur la base de "Z'êtes des couilles molles". Et puis parfois la Rédac, qui semble répondre scrupuleusement mêmes aux écritures automatiques les plus insanes, se fend d'une précision qui vaut son pesant de cachoux. L'article en question donne du scalpel à la gonzo dans les pauvres tripes d'ex-France et conclut à sa mort cérébrale. Un premier lecteur entonne une énième version des Damnés de la Terre, mélopée increvable qui colle aux basques de tous les anars dès qu'un déserteur des Troupes Coloniales enflamme une poubelle. Solidarité avec les pocketbikers illettrés qui meurent sans casque ! Et autres développements sur le Grand Soir initié par les Bons Sauvages en rogne. La réplique du comité de rédaction ne clôt pas la discussion proprement dire, puisqu'on n'empêche jamais personne de bavarder quand il n'y a plus rien à dire, d'où les dizaines de réactions qui suivent pour engraisser le schmilblick. Mais il n'y a pourtant rien à rajouter à ça :
Le rêve du Caillera Moyen c'est une BM, une pute, et une paire de baskets.
Encore plus pire que le rêve du Français Moyen.
Faut arrêter de rêver à la révolution avec ces arriérés mentaux même pas foutus de foutre le feu à la Tour TF1.
La révolution se fera sans eux, et contre eux. Ils finiront comme les asociaux sous Staline: au désert!
De toundra ou de glace.
12:40 Publié dans Autopsie de la Dissidence | Lien permanent | Commentaires (0)
27/11/2007
SUR L'AIR DE "THEY BREED - WE SLEEP"
Piqûre de rappel dans les Quartiers d’ex-France. La mort d’un petit con infoutu de conduire correctement un pocket-bike est un crime raciste d’Etat. En guise de répétition de cet axiome fondateur de l’Etat de droit moderne, nous avons droit à une nouvelle Staracailledémy dans un bled pourri dont personne n’avait jusqu’ici rien à foutre. Pas trop envie de me la jouer Madame Irma, mais je me parie une tournée de gentiane (Chapelle-des-Bois mon amour) que tout ça ne mettra pas des semaines à retomber. Et puis, malgré tout, par ennui, par dégoût, par stupidité occupationnelle, je regarde ce qu’on en dit dans la boîte-à-cons. Je regarde souvent les conneries à Yves Calvi. Son numéro de ce soir (27 novembre, comme le temps passe) aura été assez chiant, avec quelques pointes dont se rappeler, pour dans trente ans, si nous vivons encore et que fouiller dans les annales de notre mort collective nous amuse encore.
Une sorte de Grand-Frère-Educateur-de-Rue avec un prénom très Nouvelle France qui t’explique que tout ça c’est pas de l’Emeute mais de la Révolte. Un maire socialiste qui estime que nier l’existence du ouacisme antiblancs équivaudrait à un mensonge. Un Xavier Raufer qui parle cash et réplique aux lieux communs du Néofrançais avec un sourire parfaitement délicieux. Des gens qui parlent tous en même temps, impatients de déblatérer leur laïus, s’époumonant comme si on les avait menacés de castration sans anesthésie s’ils ne faisaient pas assez de bruit. Un débat de société, quoi. Le truc à regarder périodiquement pour se remettre en mémoire les raisons qui vous poussent à haïr tout groupe d’humains supérieur à deux personnes. Ça sert, parfois. Il y a des gens qui vous demandent pourquoi vous "faites semblant d’être misanthrope". C’est toujours utile d’avoir un argumentaire organisé sous le coude.
Quand on éteint le poste et qu’on retourne à sa non-existence citoyenne, on en tire quelques constats simples, exactement les mêmes qu’en 2005. Il n’y a pas de guerre civile ethnique. Il n’y a pas d’insécurité croissante. Il n’y a pas de symptômes d’un effondrement de la société capitaliste démocratique sécuritaire. Il y a tout simplement des événements festifs et bordéliques pour réitérer encore et encore l’affirmation d’un fait : nous ne faisons pas partie du même monde. Ces gens nous disent : « J’ai les mêmes papiers que toi – ou je les aurai bientôt – mais je ne veux pas de tes devoirs, de tes croyances, de tes références, de tes ancêtres. Tout ce qui est ‘toi’ est une oppression des ‘miens’. »
Economiquement, politiquement et socialement, rien de tout cela n’est grave ni dangereux, ni à court ni à long terme. Ce n’est pas non plus un problème qui concerne la police en particulier ni l’Etat en général. C’est une simple Sécession tranquille. Eh oui, « tranquille ». Ça peut paraître dur à avaler cet adjectif quand on voit son deuxième leasing partir en volutes noires sur le parking d’en-face de sa cage à lapins. Mais : pas de centaines de morts et de blessés ? Pas de prises d’otages ? Pas de barricades façon nouvelle Commune ? Pas d’insurrection structurée par un discours socioéconomique clair et révolutionnaire ? Alors c’est de la GNOGNOTTE.
Ce que nous « disent » de tels événements, c’est simplement que la bonne vieille Fracture Sociale est accomplie, que rien ne la rebouchera, qu’elle a toujours existé mais qu’elle était soigneusement maquillée en vague malaise de la jeunesse par le matraquage masochiste des rentiers de l’immigration massive. Et ce maquillage est craquelé comme le fond de teint d’une salope trop vieille pour refuser de négocier le prix de la passe. « Ils » ne sont pas « Nous ». Ils n’ont jamais voulu l’être, rares sont ceux d’entre eux qui ont réussi à faire illusion en gagnant assez de fric et en gravissant assez d’échelons dans la hiérarchie des Régulateurs et des spéculateurs.
Ce sont des choses que Monsieur Moyen mettra encore du temps à réaliser pleinement. Il finira par gober toute la pilule, un jour ou l’autre. Mais il sera trop tard. Et au moment de la dernière pénible déglutition, il se rendra compte aussi qu’avec la pilule, c’est un hameçon qu’il aura avalé en même temps. Un hameçon relié à des communautés dont il ne pourra plus se défaire. Elles auront la même « nationalité » que lui, c'est-à-dire des titres de séjour et des fiches de paie qui paralyseront toute intervention de l’Etat à leur encontre, quand bien même elles sortiraient les lance-roquettes pour officialiser pleinement leur autonomie territoriale.
Cette paralysie administrative mène d’ores et déjà à des paralysies analytiques auprès des instances officielles qui en ont la charge. Le choix du groupe d’appartenance culturelle, la définition d’un « Nous Autres » selon le taux de mélanine, ce sont des choses qu’aucune directive gouvernementale ni aucun lavage de cerveau lobbyesque ne peut éradiquer. Ça s’éteint naturellement chez les plèbes cacochymes et ça résiste à tout chez les peuples à l’épreuve du temps.
Vous aurez beau les enterrer sous leurs Certificat d’Européanitude reconnu par Bruxelles, encenser les bienfaits qu’ils représentent pour nos rentes AVS, nos besoin en main-d’œuvre et nos taux de fécondité honteux à se flinguer, RIEN n’y fera. Vous resterez toujours des Toubabs, des Faces de Craie, des exploiteurs, des descendants d’esclavagistes, les membres d’une race de racistes congénitaux, contre qui aucune insulte n’est assez vache ni aucun coup suffisamment dur.
Seulement, une séparation, c’est quand même une histoire de couple. Si l’un veut s’en aller mais que l’autre l’en empêche, il n’y a pas de divorce possible.
« Eux », ils ont déjà choisi. Ils veulent conserver la bagnole, la maison et la garde des enfants, mais ils nous laissent généreusement les factures, la pension alimentaire et le Devoir de Remord. En clair, ils nous foutent dehors – avec évidemment un droit de visite régulier pour nos filles et frangines prêtes à leur transmettre nos excuses en nature.
« Nous », c’est autre chose. D’abord parce que « Nous » n’existons pas. Monsieur Moyen adore ergoter sur les différences de marque de t-shirt, sur les disparités de revenus, sur l’inégalité des classes sociales, sur les engueulades clochemerlesques. Tout ce qui lui permet de fracturer sa communauté culturelle lui donne des frissons d’émancipation pour pas cher. Il ignore rigoureusement ce que signifie se serrer les coudes entre semblables. C’est peut-être héréditaire. Des lustres qu’on s’étripe entre voisins. Trop de peuplades, de traditions et de langues différentes sur un coin de continent aussi minuscule, ça ne peut que péter. D’où cette obsession immémoriale d’aller piquer le territoire à d’autres. La colonisation. L’exploration des océans. La fièvre des horizons lointains. Cette garantie implicite d’avoir enfin de grands espaces à ravager. Est-on sûr qu’Alexandre ait vraiment pleuré à l’idée qu’il ne lui restait plus de royaumes ennemis à conquérir ? C’est égal : l’image symbolise à elle seule les trois quarts de notre histoire collective.
Reste que malgré – ou à cause de, qui sait – ces antécédents de pillage et d’expropriation, nous avons en moins d’un siècle perdu le Feu sacré. Les meilleures choses ont une fin. Nous avons enculé la planète. La planète se venge et nous envoie la bite de tout le Tiers-Monde dans le cul, centimètre par centimètre, on va se la manger jusqu’à ce qu’elle nous brise la mâchoire de l’intérieur. La plupart d’entre « Nous » l’accepte. Ecrasée sous ce cheptel soumis, une poignée de sociopathes, de ratés, de poètes à plume tordue et de hooligans lettrés se répètent depuis cinquante ans que non, décidément, ce n’est pas un avenir acceptable. Mais ils ne sont que des grumeaux perdus dans la soupe et un demi-siècle d’agitation n’y a rien fait : la soupe ne s’est pas solidifiée autour d’eux. Il n’y a pas de Choc des Civilisations parce qu’ « Eux » n’en ont jamais vraiment eu une, et parce que « Nous » avons sabordé consciencieusement la nôtre. Arrière-Grand-Papa a commencé le boulot en bandes molletières. Grand-Papa l’a achevé à coups d’Etoile Rouge et de Stars and Stripes. Papa, qui n’a rien compris au film, a assuré les finitions avec trois pavés, deux manifestes pro-partouze et une éducation de ses gamins qui ressemblait à une longue IVG post-partum.
Oui, c’est mal barré. Non, ce n’est pas irréversible. Profite que je sois vaguement optimiste pendant deux secondes, toi le malheureux surfeur qui m’accorde ton attention par pitié ou curiosité anthropologique.
Entre « Eux » et « Nous », un obstacle jusqu’ici insurmontable : nos Zélus et nos Fournisseurs-d’Emplois. Voilà une belle paire de cochons pour qui ce deal invraisemblable mérite toute notre attention. Ils nous le font assez comprendre : Touche Pas A Mon Client/Electeur. C’est votre avenir, ces Jeunes révoltés, qu’ils nous serinent. Acceptez-les au plus vite. Baissez les yeux, c’est mieux que de vous les faire crever. Et puis pensez aux avantages, à ces hordes d’hommes vigoureux et de femmes sensuelles, tous prêts à vous échanger fraternellement un peu de chaleur humaine contre le gîte, le couvert et la naturalisation. L’économie de marché, ça se passe aussi dans la chambre à coucher. Soyons terre-à-terre. C’est pas du cynisme, c’est du réalisme, de la maturité, le courage de se comporter en adulte dans un monde qui ne badine pas avec la marchandise. Vous trouverez bien une raison. Démerdez-vous. Comme si vous aviez le choix de toute manière.
Il n’y aura pas de solution à ce problème tant que ces putain de Frères Siamois interviendront dans nos affaires. Ou plus justement, tant que nous les laisserons analyser, circonscrire, gérer et rentabiliser en duo des problèmes sociaux auxquels ils ne devraient jamais pouvoir toucher sans y perdre au moins une main. Bulletin de vote, vidéosurveillance, budgets prévention, crédits répression, séminaires de sociologie urbaine, gadgets d’autodéfense semi-légaux, durcissement ou débandade des « lois-muselières » - KIF-KIF TOUT ÇA.
Pour en avoir une énième confirmation, tendez une oreille attentive à « Leur » discours, corroboré par toutes les chiennes et les mercenaires qui se précipitent pour élever le moindre de leur étron au statut d’œuvre d’art militant. Vous n’entendrez parler que de mise à l’écart, de discrimination, de mauvaise insertion, de désintégration sociale, de ghettoïsation, de manque de représentativité, et pourquoi pas de ségrégation statocapitaliste s’il y a un bourdieusien à peu près clean qui traîne dans le bistrot. Autant d’explications rationnelles à des comportements d’hostilité systématique, réflexive pour ainsi dire.
Excuses à deux balles le charter. Mais pas que ça : ce sont autant d’obstacles qui ne Les ont pas empêchés de retrouver/maintenir/inventer une solidarité instinctive contre l’Ennemi, le Blanchouille, le Riche, le Patron, le Raciste, le Souchien.
Ils ont sauté par-dessus tout ça comme un 110 mètres haies, comme une course à sac de gamins. Ils sont censés être en marge, désorganisés, pas écoutés, méprisés, sans débouchés, réduits à la misère et à l’aliénation, et BAM ! Le moindre accident mongolien et c’est toute la té-ci qui part en feu de Bengale. Ils se sont joyeusement passés de tout l’arsenal associatif, métapo et militant que le dernier carré Réac agite désespérément comme ses seuls moyens de coaguler une opinion publique partagée entre je-m’en-foutisme et dhimmitude.
Il y a là comme une putain de leçon à tirer.
20:30 Publié dans La Zone Grise | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : L'abus de vodka-pomme peut provoquer des logorhées incontrôlabl
24/11/2007
A - PO - LI - TI - QUES
Nous n'avons jamais été "politisés" et nous ne serons jamais concernés par la "politique", par rien de ce qui préoccupe les Régulateurs des égouts de la Polis. (Je dis "nous" plus par politesse que par prétention).
Un UDC de plus ou de moins au Conseil Fédéral ?
La naturalisation automatique ou éreintante des allogènes ?
Plus de flics ou plus d'éducateurs dans les rues?
Moins d'impôts pour les riches ou plus d'allocs pour les pauvres ?
RIEN A BATTRE.
Mais alors absolument rien.
Sincèrement. Un constat sans exagération aucune.
Nous n'avons jamais voulu de strapontin au club des gestionnaires du désastre.
On a dû se gourrer dans l'heure, se tromper dans la saison, pour en venir à donner des avis constructifs sur telle ou telle partie de la tuyauterie souterraine de la démocratie. Tout ceci ne nous concerne pas. Rien n'en affecte nos existences dans des proportions que l'on puisse remarquer.
En tant qu'individu, peut-être bien que je peux avoir à secouer qu'on me propose 10% de plus ou 10% de moins sur mes factures d'assurances. Au moment de remplir une ou deux étagères du frigo, c'est sûr que la notion de "pouvoir d'achat" devient quelque peu palpable. En faire un idéal ? Un cri de guerre ? Une "philosophie-de-vie" comme on dit chez les blaireaux ? Autant faire pousser des fleurs sous les rayons d'un néon d'une ampoule à basse consommation, pardon. Un comateux peut vivre avec une perf' de glucose, une sonde anale permanente et un bon traitement contre les escarres. Est-ce que sa vie lui sert encore à quelque chose ? Qu'on se pose aussi la question à l'échelle de toute une civilisation qui ne vit plus que pour écouler ses marchandises, soutenir ses flux financiers et inventer du boulot pour des millions de gens qui, s'ils ne bossaient pas, n'entraîneraient pas l'effondrement du Système puisqu'il n'a pas besoin d'eux.
Le "tissu social" ne se détricote pas seulement parce que nos voisins n'ont ni la même gueule ni la même langue que nous. Ca aide foutrement mais ce n'est pas suffisant. Si nous vivons de plus en plus comme des autistes entassés dans des bétaillères à air conditionné, c'est aussi et surtout parce que nous ne croyons plus à que dalle. La dernière religion de l'Europe sous sa forme originelle, c'est de se prosterner devant les sectes les plus grotesques et les idéaux de microcéphales du moment qu'on a la garantie qu'ils sont "Différents". Tout tolérer sauf l'Intolérance. Ne rien choisir sauf ceux qui choisissent de choisir (on appelle ça de la Discrimination). Ne s'intéresser absolument à rien de métaphysique, de philosophique, et envisager tout groupe humain comme une vache à lait, qu'il faut nourrir, traire, et vacciner contre les infections qui ferait baisser son rendement.
La "politique" officielle traite nos existences de la même manière que la médecine envisage nos anatomies. L'hygiénisme social est pratiquement passé dans les moeurs et toutes les déviances de la norme ont désormais le statut de maladies à traiter. Quant au troupeau qui ne va pas trop mal, paie ses impôts et n'empêche pas la police de faire son travail n'est-ce pas, elle n'est qu'une grande machinerie à la Tinguely, qu'il faut huiler et nettoyer de temps à autres, mais dont plus personne ne sait exactement à quoi elle sert. L'Occident n'a plus d'avenir et choisit la dilution culturelle parce qu'il a renié une à une toutes les missions historiques qu'il avait accepté jusqu'alors. Sûr, elles n'étaient ni plus belles ni moins absurdes que les croyances des dernières civilisations amérindiennes. Aller foutre le souk à Jérusalem sous prétexte de libérer le tombeau du Christ était une mauvaise idée en soi, et sans doute un pillage organisé déguisé en acte de foi collectif. Et puis ?
Nous savons encore moins ce qui a motivé les populations qui ont érigé les monolithes de Stonehenge. Nous considérons avec un ahurissement rationaliste les pyramides de Gizeh, en nous demandant comment des générations d'Egyptions ont pu dépenser une telle énergie pour une simple tombe royale. Les verdâtres nous racontent l'histoire présumée de Rapa Nui, parabole d'un peuple qui a coupé tous ses arbres pour dresser des statues à la gloire d'on ne sait quelle divinité anonyme. L'esprit du temps ne veut y voir que des élans absurdes, des entreprises délirantes ou criminelles. Et pourtant nos tripes, sourdes à ces arguties de boutiquier, se tordent encore des millénaires plus tard face à ce spectacle, ces stigmates témoins des fièvres créatrices qui dépassent et ridiculisent nos pauvres aspirations. Ces populaces immenses n'agissaient pas pour des pourcentages de salaires, des conventions collectives, "Rêveries de branleur", ricane quiconque doit faire croûter sa famille. Et il aura raison de se foutre de ma gueule. Je l'accepte d'avance. Et je maintiens que l'Europe est morte parce que ses derniers poètes n'étaient capables que de rêver à des termitières humaines. A Porto Allegre comme à Davos, c'est un même idéal de cyborg qu'on bricole entre illuminés, unis par une nausée d'envergure cosmique pour tout ce qui rattache un peuple au coin de terre sur lequel il marche et qu'il fertilisera moins d'un siècle après y être né.
Avoir un organisme en relative bonne forme m'intéresse, oui. Je fais ce que je peux pour le maintenir en l'état et pour en améliorer les éléments les plus défaillants. Mais je ne consulte pas un toubib trois fois par semaine. L'influence de l'alcool ou des nourritures grasses sur ma santé ne me réveille pas au milieu de la nuit. Les séquelles à long terme de mes accidents de bécane ne constituent pas ma seule source de préoccupation. Si je traîne quelque virus ou fracture, je ferai ce qu'il faudra pour m'y soustraire. Mais une fois de retour à la normale, putain de merde, j'ai mieux à faire de ma vie que de compter les fruits-et-légumes-par-jour que j'avale. Ce qui est valable pour mon système digestif vaut aussi pour le corps social dans son ensemble. Les questions économiques ressemblent foutrement à l'ordinaire d'un entérologue : vérifier que les transits vont dans le bon sens, que les flux sont maintenus, qu'on consomme et produit suffisamment de matériaux divers. En fait, c'est tout notre édifice social qui est devenu un gigantesque intestin, une machine à bouffer, à digérer, à chier, et à reconsommer sa propre merde.
La couleur de ces excréments, leur odeur, leur poids, leur répartition plus ou moins égale entre hommes et femmes ou entre nationaux et sans-papiers ? MAIS RIEN A FOUTRE ! Nous nous contrefoutons des questions de "fondements", seules nous intéressent les questions de fond. Et personne, jamais, nulle part, ne pose ces questions. Libéraux, conservateurs, socialistes, capitalistes, centristes, sécuritaires, tous se réfèrent systématiquement au même système de valeurs indiscutables et incontournables qui postule respectivement que :
- la Démocratie est le seul régime politique digne de ce nom ;
- les Droits de l'Homme sont à la fois naturels et nécessaires, une question de bon sens et l'aboutissement de la pensée humaine ;
- les gesticulations les plus clownesques et les plus new-age sont acceptables du moment qu'elles rendent hommage à Saint-Climat ;
Etat ou Marché, peu importe l'Autorité Suprême dont on est invité à sucer les orteils. Tout ce que leurs adorateurs respectifs lui demandent, c'est d'assurer le maintien des surplus de mangeaille, le respect des horaires des transports en commun, la stabilité du PIB, la continuité de la Croassance. On fait d'excellentes entreprises avec cette recette. On ne fait pas une société ni une civilisation, sauf à penser qu'un élevage de porcs ou de poulets est un modèle universel.
Tortillez tant que vous voudrez, vous retomberez toujours sur ces mêmes saletés. Y a-t-il encore qui que ce soit qui parle de Liberté, et de ce qu'on peut faire avec ? Oui : Reporters Sans Frontières, chaque année, au moment de vendre leur album officiel. Pour toutes les autres officines médiatiques, qu'elles se réclament d'un parti ou d'une église, toute liberté qui n'est pas celle de la presse uniquement n'a pas d'intérêt. Nous "vivons" dans un pays libre. J'ai le "droit" de choisir en mon âme et conscience entre döner et bigmac. Je suis "libre" de zapper la Starac' ou de couper le son pendant la pub. Je ne suis pas "obligé" de faire exactement le même boulot que mon père. C'est supposé me suffire. Rechigner là-contre est le propre des gosses de riches, des enfants gâtés, des immatures, des inadaptés. Ta cage est chauffée, on change la paille tous les jours, c'est quoi ton problème, ducon ?
Alors d'accord pour fermer ma gueule. Aucun problème. Je finirai bien par le faire, comme tout le monde. Parce qu'on ne peut pas passer sa vie à gueuler. Ca ne paie pas les factures. Ca ne remplit pas le frigo. Ca ne permet pas d'échapper aux impôts et aux impératifs d'une vie en société qu'on n'a pas les couilles de quitter ou de dynamiter. Mais qu'on ne me demande pas d'aimer ça ni de faire semblant d'aimer ça.
15:10 Publié dans La Zone Grise | Lien permanent | Commentaires (5)
21/11/2007
EN ATTENDANT LE RETOUR DU BOOMERANG
Ils veulent nous « niquer », de préférence « jusqu’à ce qu’on les aime. » Ils nous le répètent assez. C’est entendu.
Est-ce une incitation au meurtre et une apologie du terrorisme, si je dis que la seule réponse proportionnée d’aller défier leurs petits cocktails Molotov avec en bandoulière des jerrycans agrémentés de clous ? De répondre à l’occupation du terrain par la politique de la terre brûlée jusqu’en profondeur ?
Sans doute, oui.
Evidemment.
Suis-je distrait.
Ça crève les yeux.
Alors je ne le dis pas.
Je ne le pense même pas. Arrière, fantasmes malsains ! Je vous dénonce avec une indignation vibrante et Citoyenne. Opprobre et camisole de force à ceux qui concevraient de pareilles horreurs. Délires irresponsables de puceau frustré, gavé de shoot-em-up, de porno SM et d’alcopops au point d’en oublier jusqu’à la notion même de décence.
Précaution bien inutile, cependant. Parce que des kamikazes blanchouilles, on n’en verra pas des masses durant ce siècle. Ce n’est de toute façon pas le style de l’ex-forteresse Europe. Il faut pour cela une foi indestructible, une abnégation presque inhumaine, la conviction que Gott est avec uns, autant de choses aussi rares en Europe que des boules de geisha dans un paquet de pop-corn. (Plus rares que ça en fait : le sex-toy est en train de devenir si tendance qu’à terme, il sera plus facile de se balader avec un gode dans le cul qu’avec une clope au bec.)
Gott a depuis longtemps estimé que uns étions un ramassis de sous-merdes, mûres pour la dilution et l’arrachage des souches pourries. Gott doit être jardinier, à ses heures. Et dans son infinie sagesse, il a vu que l’arbre occidental perdait ses feuilles, que sa sève s’était retirée de ses racines, que ses fruits étaient rares et immangeables, qu’ils poussaient même sans graines ni écorce, d’atroces fruits mous réduits en confiture à peine la fleur fanée.
Alors Gott s’est dit qu’une greffe pourrait lui faire du bien, à ce continent qui sent le désinfectant de morgue. Une greffe massive de branches et de bourgeons piochés dans des espèces exotiques, plus vigoureuses, plus résistantes. A ce jour, les greffons les plus absurdes et les plus comiques sont très bien tolérés par la plante. Faut dire qu’elle est tellement déboussolée… c’en est au point qu’elle fait sa photosynthèse avec la lumière des néons et les flashs des radars autoroutiers.
Tour de force divin : c’est parmi ceux qui gerbent Son nom qu’Il trouve une profusion de petites mains vertes, toutes disposées à faciliter l’opération. Pas plus collabo qu’un cureton. Et pas plus cul-bénit qu’un agnostique qui milite pour un monde moins blanc plus juste. Nos interminables funérailles ont réconcilié Don Camillo et Pépone, qui se relaient pour nous balancer des poignées de glaise sur le coin du cercueil. Voilà bien la seule chose qui rend comestible l'obsession anticléricale des paganos et leurs tirades sur la "religion pour les faibles". N'empêche qu'elle a sacrément sapé vos antiques sanctuaires, cette prétendue jérémiade-du-désert !
Evidemment, le résultat donnera un hybride cocasse, sans plus rien de commun avec ce qui était prévu à la base. Mais quoi ? D’ici quelques saisons, la récolte des nouveaux fruits bâtards n’aura plus rien d’exceptionnel. Il faudra même donner un nom à cette nouvelle variété, qui finira par s’imposer comme une évidence, un nouveau classique, effaçant jusqu’à la mémoire de l’original. Il avait fait son temps, de toute manière. Qui regrette, à part des sensuels illuminés, les centaines de sortes de tomates éliminées du marché, qu’ils n’ont jamais connues ni goûtées ?
Faut-il être con et doctrinaire pour cultiver la nostalgie de ce qui est mort avant qu’on naisse. Nostra maxima culpa.
Il faudra plus, bien plus qu'un retour à l'Amour des Nôtres pour être à nouveau maîtres sur nos terres. Il faudra suivre l'exemple de ceux qui veulent nous remplacer et nous approprier intégralement cette rage automatique, ce réflexe d'hostilité animale face à l'ennemi. Eux ne s'embarrassent pas de longs débats sur la nature de cet ennemi, sur les alliés possibles, sur le flou des frontières. Ils ne calquent pas sur la définition de leur "Nous" les mêmes arguties qu'un Soral opposait à Desouche dans son récent interviou. Leur propre diversité ne les prévient pas vraiment de faire bloc contre le Cul-Blanc conçu lui aussi comme un bloc homogène, secrètement ouaciste, hypocritement humanitaire, clandestinement colonialiste, qui discrimine comme il respire. Réfléchir et agir en cro-magnons ne leur pose pas de graves problèmes existentiels. Dragouiller 0,1% d'électeurs-fantômes ne fait pas partie de leurs objectifs. La cohérence doctrinaire, rien à battre. Pousser Cul-Blanc dehors, un slogan amplement suffisant et éloquent.
Suffit de jeter un oeil aux émeutiers d'Occident depuis un bon quart de siècle pour mesurer l'ampleur du décalage et comprendre en un instant qui est condamné à perdre. Beaucoup de bruit, quelques flammes, un peu de fumée, une poignée de vitrines cassées, wow. Et pour une poignée d'agitateurs prêts à se frotter quelque peu à la flicaille (ce qui doit bien évidemment terroriser le pouvoir en place), des hordes hirsutes qui chantent, qui sautillent, qui promènent leur colère souriante le long des parcours balisés. La spontanéité d'une fête du Travail à Pyongyang, et le potentiel révolutionnaire à peu près égal.
De fait, les dieux n'ont jamais eu de Peuple Elu. Ceux qui s'en sont réclamés ont toujours fourni eux-mêmes les prophètes pour entendre et lire ce qu'ils voulaient. Les dieux n'aiment que la Colère et ils accorderont leurs faveurs à celui qui bouffera le plus la gueule à l'autre. Les Athéniens le savaient aussi bien que les Normands. Le mythe du Berserker illustre à merveille le caractère sacré de la fureur de vaincre l'ennemi. Et l'ex-Européen moderne a, plus que toute autre chose, perdu sa capacité à se foutre en rogne. Il crève avant tout de cette carence qu'aucun complément alimentaire ne compense.
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